L'Économie en VO : Débat économique avec Régis Arnoux CIS Catering et Chris Connors HCL Technologies (2ème partie) .
Invité économie : Christian Parisot Chef économiste Aurel BGC
Débat économique dans le cadre du magazine « l’Economie en VO » en partenariat avec la Banque Palatine
Débat avec Régis Arnoux CIS Catering et Chris Connors HCL Technologies (2ème partie).
CIS Catering est une entreprise basée à Marseille qui est présente dans de nombreux pays et offre des services (cantine, hôtel plateformes.. logement nourriture services..) pour des acteurs du secteur minier et pétrolier notamment.
HCL Technologies est une entreprise indienne de services informatiques qui a connu au cours des dernières années une forte croissance malgré la crise. Le pdg de la société Vineet Nayar a écrit un livre à succès « Les employés d’abord, les clients ensuite » (Employées First, Customers Second), qui montre la transformation de cette SSII indienne en prestataires de services de niveau mondial. Un parcours intéressant à découvrir.
Deux entreprises au profil très international, dans un contexte économique perturbé. Comment s’adaptent-elles ?
La seconde partie nous amène à comprendre les enjeux de l’évolution de la stratégie de ces entreprises dans un contexte économique délicat (crise de 2008, situation différente dans les pays émergents et les pays de la zone euro..)
En fil rouge toujours Christian Parisot (Aurel BGC).
Web TV www.labourseetlavie.com : Christian Parisot, sur cet environnement toujours, quels sont les principaux risques que l’on peut mettre en face pour les entreprises ? On a entendu parler à nouveau – on l’avait entendu au début de la crise en 2008 – de credit crunch – effectivement que les banques ne prêtent plus aux entreprises, ça fait partie des risques dont on peut avoir peur ?
Christian Parisot : Alors, très clairement, on a tous le souvenir de Lehman. Ce qui s’était passé c’est d’un seul coup pourquoi les entreprises avaient coupé leur budget informatique, leur budget d’investissement, c’est qu’elles avaient une peur de ne pas avoir les liquidités nécessaires parce que les banques n’allaient pas leur prêter. Alors aujourd’hui on commence à avoir des retours sur, je dirais, presque anecdotiques, ce n’est jamais évident de mesurer ce credit crunch parce que finalement c’est cet été, c’est au mois d’août que ça a vraiment commencé à affecter les banques. Ce n’est pas immédiat, la répercussion n’est pas immédiate, donc c’est maintenant que l’on va peut-être avoir des mesures mais on n’a pas des mesures très fortes aujourd’hui qui montrent qu’il y a un credit crunch. Par contre il y a un élément, un seul élément qui est très positif par rapport à 2008, c’est qu’aujourd’hui les entreprises ont accès aux marchés, alors je parle surtout des grandes entreprises, ont accès aux marchés et peuvent emprunter directement sur les marchés. C’est-à-dire qu’aujourd’hui les investisseurs ne veulent pas prêter aux banques mais ils veulent bien prêter aux entreprises. Ils considèrent même mieux qu’il vaut mieux prêter à une entreprise qu’à un État ou à une banque. Donc on voit que ça c’est un petit peu renversé. Donc pour les grandes entreprises je ne suis pas très inquiet parce que je pense qu’aujourd’hui elles ont des liquidités dans leur bilan, elles n’ont pas d’investissements énormes, ils ont des capacités d’autofinancement, donc je ne vois pas le même mouvement qu’en 2008. Par contre, où je suis très inquiet, c’est pour le tissu des PME naturellement. Elles, elles sont très dépendantes des banques, ce n’est pas possible pour une PME d’aller se financer sur les marchés directement et là vraiment il y a un risque de crédit crunch. Le meilleur exemple c’était dans l’aéronautique où on voit que Airbus commence à tirer le signal d’alarme en disant : « mes sous-traitants aujourd’hui risquent d’avoir des retards de livraison parce que les banques ne leur prêtent pas ce qu’il faut pour alimenter leurs fonds de roulement. Donc là on a un vrai risque mais plus sur le tissu des PME que vraiment des grandes entreprises.
Web TV www.labourseetlavie.com : Régis Arnoux, vous êtes une grosse PME vous, mais ces questions de trésorerie, de gestion de la trésorerie et d’investissement, c’est important dans la période ?
Régis Arnoux : Oui, c’est fondamental et au niveau de la stratégie depuis l’origine de la création de CIS, j’ai pris une position de renforcement de la trésorerie des fonds propres en limitant les distributions à 30 % des résultats nets et heureusement aujourd’hui, comme cela est signalé, effectivement les banques sont beaucoup plus frileuses. Je vais investir prochainement au Brésil, on est au Brésil depuis 11 ans déjà à Macaé sur l’offshore pétrolier brésilien où comme vous le savez il va y avoir des développements considérables puisqu’il y a des découvertes en eau profonde Carioca Tupi qui vont mobiliser des centaines de milliards d’investissements. Donc je vais investir là-bas en achetant un terrain, en construisant des bâtiments, en ayant une plate-forme logistique, comme on l’a en Algérie, dont on sera propriétaire.
Donc aujourd’hui pour CIS, le financement dans des proportions évidemment adéquates ne pose pas de problème parce que la stratégie d’origine a été celle que j’ai indiquée et donc les banques m’accompagnent pour l’instant sans difficulté.
Mais si vous permettez, je rebondis deux secondes sur ce que disait Monsieur, j’ai rencontré il n’y a pas longtemps un industriel qui est dans le domaine technique de fabrication en particulier de chariots élévateurs avec une position remarquable et on a échangé différents propos : « comment ça va, etc. » il lui me dit : « il y a trois ans j’avais un chiffre d’affaires de 650 millions d’euros, en 2010 je suis tombé à 200 millions d’euros pour les raisons que vous exposiez, et j’espère rebondir en 2011 à 300 millions d’euros. Mais c’est hallucinant ce qui se passe. ». Et donc effectivement s’il n’y a pas une stratégie d’évolution permanente par rapport à une évolution extrêmement rapide de la planète, beaucoup d’entreprises sont vouées à des lendemains très inquiétants.
Web TV www.labourseetlavie.com : Chris Connors, dans le livre qu’a écrit le PDG de la société, on voit l’analyse que finalement notre environnement, l’environnement dont on vient de parler, est de plus en plus complexe, de plus en plus changeant et que les entreprises, y compris une société de services informatiques, alors c’est vrai qu’on le voit peut-être à travers certains outils comme les Smartphones, comme l’évolution de produits de grande consommation, on voit que cela évolue très vite, mais finalement une entreprise comme la vôtre doit évoluer en permanence pour s’adapter, pour offrir à ses clients de nouveaux services puisque cela va très très vite ?
Chris Connors : Oui, justement, en fait, le rôle du DSI dans les grandes entreprises, dans toutes les entreprises, a bien changé. Dans les années qui viennent de passer, il y a cinq ou dix ans, le rôle était plutôt d’assurer que les systèmes, les opérations faisaient tourner l’entreprise d’une manière efficace. Maintenant c’est complètement différent, le rôle du DSI est de vraiment faire changer le modèle de l’entreprise avec tout ce qui est le commerce digital, avec les changements de modèles en intégrant l’informatique dans le centre de l’entreprise, le rôle est très très important et qui évolue tout le temps. Et le rôle d’une entreprise informatique comme HCL c’est effectivement d’accompagner le DSI dans son challenge, de faire l’informatique, de produire de l’informatique la rentabilité qui n’était pas là.
Web TV www.labourseetlavie.com : Donc, il faut être capable de réagir et effectivement de changer le modèle de l’entreprise pour gagner du chiffre d’affaires, pour gagner des parts de marché parce que on le disait, les sociétés indiennes représentent 1 % du marché de la sous-traitance informatique face aux IBM, Accenture et autres, donc il y a un potentiel important pour ces sociétés, pour votre société, pour se développer sur ce marché ?
Chris Connors : Le marché informatique en Inde représente à peu près 50 milliards de dollars chaque année en fait. Ce que l’on voit en général c’est que le marché en Europe des sociétés indiennes est en croissance entre 15 et 25 %, même 30 %. Alors c’est clair que les compétences que l’on peut trouver en Inde, l’échelle industrialisation, standardisation, deviennent de plus en plus centrales dans la gestion d’informatique en Europe.
Web TV www.labourseetlavie.com : Alors, ce que vous avez appliqué en Inde, est-ce que vous l’avez appliqué dans le monde entier ? C’est-à-dire que, là on peut lire dans ce livre : « redéfinir le rôle du PDG, le pouvoir trop important que détient le PDG » ce sont des choses étonnantes. Est-ce qu’en Europe ça a fonctionné ? Est-ce qu’il y a eu un retour positif des Européens – on peut parler aussi des États-Unis – sur ce changement de fonctionnement de l’entreprise ?
Chris Connors : Oui. D’abord il y a un intérêt énorme dans le livre de M. Nayar, c’était le numéro un dans les ventes de management Amazon.fr au mois de juin. Alors il y a un intérêt intellectuel. Derrière en fait ce qui est important c’est que nos clients peuvent voir que cela se traduit dans une intensité dans l’engagement que l’on a avec eux aujourd’hui et c’est cela qui compte pour eux parce qu’une philosophie de management est intéressante, mais ce qui compte le plus ce sont les résultats qui peuvent voir devant eux.
Web TV www.labourseetlavie.com : Régis Arnoux sur ces cultures dans l’entreprise CIS, on parlait d’une grosse PME, mais il y a aujourd’hui beaucoup de cultures qui sont présentes puisque vous êtes sur ces différentes zones, vous avez parlé du Brésil, la Mauritanie, des pays d’Afrique, on arrive justement à faire une synthèse, une symbiose CIS Catering comme cela ?
Régis Arnoux : Oui, alors j’écoutais attentivement, intéressé par le livre qui a été écrit par le président de votre Groupe. C’est vrai que nous, on est société de services, 10 000 personnes aujourd’hui dans le Groupe, et que le phénomène humain est fondamental. Je dirais quand même que l’objectif prioritaire, c’est la satisfaction des clients. Je rappelle rapidement que CIS est une société de services ciblé avec un cœur de métier qui est l’hôtellerie et la restauration et avec toute une série de services affiliés. Donc la notion de service est fondamental, la notion humaine est fondamentale, la satisfaction client également comme tout le monde fondamentale. Alors pour réunir un peu cette collectivité humaine qui appartient à différentes nationalités et origines, chaque année il y a une convention internationale, et je vais l’avoir en novembre en France, où là tous les patrons de pays, toute la direction, mais également des collaborateurs locaux choisis par les patrons de pays viennent à cette convention qui a pour objectif de recaler les objectifs, de voir le réalisé par rapport à ce qui a été prévu au départ, mais également de fédérer une collectivité humaine qui est de 35 pays différents, ça c’est très important.
Web TV www.labourseetlavie.com : Donc essayer de créer ce groupe quelque part
Régis Arnoux : De créer ce groupe international autour d’un pilote qui est en France et en province à Marseille (ce que j’ai voulu personnellement du fait de mes origines).
Web TV www.labourseetlavie.com : Alors, cela veut dire à la fois du local, effectivement aussi de s’appuyer sur des locaux, il y a de l’encadrement
Régis Arnoux : Il y a de l’encadrement occidental, mais parallèlement à cela, à tout niveau il y a des collaborateurs locaux. Au Brésil en a 97 % de collaborateurs brésiliens à tout niveau, en Algérie c’est à peu près du même type, et dans les principaux pays l’objectif est que les locaux prennent petit à petit la direction des opérations. Ce qui veut dire qu’en stratégie également, il y a des actions beaucoup plus fortes de partenariat avec des entités locales, que ce soit au Kazakhstan, en Russie, en Afrique, au Moyen-Orient, le partenariat est beaucoup plus essentiel pour le développement que ce qu’il était il y a quelques années en arrière.
2 novembre 2011 www.labourseetlavie.com. Tous droits réservés.
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