Interview Benoît Flamant Responsable Gestion Techs Fourpoints Investment Managers.
La nouvelle donne des valeurs technologiques : Microsoft qui rachète Nokia

15 septembre 2013 10 h 55 min
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La nouvelle donne des valeurs technologiques : Microsoft qui rachète Nokia.

Nokia valeur fétiche des années 2000 dont les investisseurs scrutaient le résultat net par action trimestriel a fini sa vie chez Microsoft, après avoir raté le virage des smartphones initié par Apple. Le secteur qui connaît de nombreux bouleversements est coûtumier de ce genre d’évènement, et ceux qui ont connu la bulle technologique ont aussi vu des grands noms disparaître.

Nous parlons de cette actualité Nokia Microsoft et du secteur avec un spécialiste :  Benoît Flamant Responsable Gestion Techs Fourpoints Investment Managers

Web TV www.labourseetlavie.com : Benoît Flamant, bonjour. Vous êtes responsable de la gestion Tech chez Fourpoints Investment Managers, on va parler avec vous de cette activité des valeurs technologiques, qui est assez riche, avec bien sûr le deal Microsoft Nokia. On a parlé également de Verizon et de Vodafone, on parle du nouvel iPhone, vraiment une actualité chargée. Si on revient sur d’abord cette opération importante de Microsoft avec Nokia, qu’est-ce qui, vous, vous interpelle le plus justement sur ces techno qui… sur ce type d’acquisition ?

Benoît Flamant, Directeur de Gestion Tech de Fourpoints IM : C’est la fin de Nokia, il faut le dire, la société, la marque va disparaître. C’est un échec, c’est un échec total, donc voilà… Après je dirais que quelque part maintenant, si vous voulez, la patate elle repasse chez Microsoft. Je crois que le message c’est cela que cela voulait dire, c’est que Microsoft… Nokia allait dans le mur, et donc il fallait qu’il fasse quelque chose, et donc Microsoft avait de solutions. Ou bien il arrêtait ou bien il reprenait Nokia pour donner des garanties aux développeurs d’applications, aux opérateurs, aux partenaires que « non, non, il y a un «commitment » de Microsoft pour continuer » et Microsoft va mettre encore plus de moyens qu’avant. Donc cela peut être la fuite en avant ou peut-être que Microsoft y arrivera. Microsoft a une conviction intime, notamment Steve Ballmer que de toute façon, si on essaie une fois, deux fois, trois fois, on finit toujours par y arriver. Alors c’est vrai, ce n’est pas toujours vrai, mais du coup ils essayent toujours. Microsoft n’abandonne jamais, ne cède jamais rien, et c’est d’ailleurs une raison pour lesquelles les investisseurs sont assez froids avec Microsoft, ils considèrent qu’il faut savoir vendre des activités à la GE, à la IBM.

Web TV www.labourseetlavie.com : Pour les boursiers un petit peu passionnés, Nokia cela a été une valeur vedette de la côte dans les années 2000, dans cette période Internet notamment, on en avait parlé ensemble à l’époque, Nokia c’était un peu la valeur que l’on regardait trimestre par trimestre, le résultat de Nokia, le résultat par action de Nokia c’était quelque chose que les investisseurs regardaient vraiment de près. Quand même, en un mot, comment on a pu arriver de ce Nokia-là au Nokia d’aujourd’hui, obligé de se faire racheter quelque part ?

Benoît Flamant, Directeur de Gestion Tech de Fourpoints IM : Oui, société phare que l’on montrait en exemple, société qui était très tôt dans les pays émergents, elle a craqué le marché chinois, 50 % du marché, 75 % du marché de l’Inde, 40 % du marché des Smartphones, un cours de bourse qui fait X 600 entre 92 et 2000, que demander de plus ? Ollila était une star comme Steve Jobs ou Bill Gates, et puis voilà, tout cela est parti en fumée. C’est assez fascinant. Je crois que, si vous voulez, les technologies cela va vite, les technologies consommateurs cela va encore plus vite, et puis là on a une rupture qui est quand même majeure. Je ne vais pas, si vous voulez, donner des excuses à Nokia, mais une rupture telle qu’on l’a connue avec l’arrivée des Smartphones et l’iPhone, c’est quelque chose qui est incroyable. Aujourd’hui, vous avez plus de 50 % des téléphones dans le monde vendus qui sont des Smartphones, six ans après, c’est inimaginable. Donc si vous voulez, il faut, à mon avis, un management hors du commun pour réagir, accepter de se remettre complètement en cause, repartir d’une page blanche, et donc voilà, le management de Nokia n’était pas à la hauteur. Est-ce que Ollila qui était parti en 2006 aurait fait cela ? On ne sait pas, on ne saura jamais.

Web TV www.labourseetlavie.com : On ne le saura pas. On pourrait dire que Samsung, lui, le groupe coréen, a pris clairement, a suivi la trace d’Apple, et plus que bien, puisque a une part importante de marché sur ces Smartphones.

Benoît Flamant, Directeur de Gestion Tech de Fourpoints IM : Oui, c’est cela, 32 % de parts de marché, Apple c’est 14, et en fait Samsung… On pourrait dire c’est la combinaison Samsung et Android de Google, c’est la combinaison des deux, si vous voulez, l’un qui fournit le système d’exploitation, qui n’arrête pas d’innover, donc qui a largement rattrapé, moi à mon avis même dépassé sur certains points IOS d’Apple, et puis la puissance marketing, la puissance de la force de frappe de Samsung et la réactivité de Samsung qui est capable de réagir, et aussi d’essayer. Contrairement à Apple qui dit : « Moi je sais mieux que tout le monde ce que les gens veulent », Samsung dit : « Moi je vais essayer le marketing traditionnel. On va essayer de faire des écrans plus grands. Tiens ça marche, si on va faire encore plus grand. » Et puis voilà, on essaye, on segmente, et tout cela fait que vous arrivez à 32 % de parts de marché.

Web TV www.labourseetlavie.com : Alors, quand on parlait de Nokia, c’est bien entendu un acteur européen, c’était un acteur européen clé, phare, est-ce que c’est l’Europe des telecoms qui avait effectivement du mobile qui perd au profit des Américains et des Coréens ?

Benoît Flamant, Directeur de Gestion Tech de Fourpoints IM : Oui, il y a un pas que certains franchissent. Je lisais, là ce matin, Fleur Pellerin… oui, c’est à cause de la réglementation, c’est Bruxelles encore une fois… Bon, je pense que d’autres disaient que Alcatel était en difficulté à cause de cela. Non je crois que, si vous voulez, cela serait probablement arrivé de toute façon. Je pense que l’on est dans une logique mondiale, on est dans une logique industrielle, dans une logique marketing, surtout on est dans une logique maintenant logicielle, Internet. Et ça, ce n’était pas le point fort de Nokia, c’était une société qui était quand même très axée sur le matériel. Donc je crois que cela serait arrivé quand même. Donc c’est vrai que oui, l’industrie des télécoms, on a tout inventé en Europe, le standard aujourd’hui, la 3G, la 4G, ce sont les standards européens, ce sont eux qui ont gagné, mais ce ne sont pas les industriels européens qui ont gagné.

Web TV www.labourseetlavie.com : Donc on retrouve effectivement la question clé du marketing, finalement du commercial. Sans commercial efficace et sans marketing efficace, on a beau avoir un produit qui fonctionne, qui est peut-être technologiquement au point, cela ne suffit pas.

Benoît Flamant, Directeur de Gestion Tech de Fourpoints IM : Oui, encore que Nokia, je crois, avait un marketing extraordinairement efficace. La marque Nokia, connecting people, tout le monde connaît ça dans le monde entier. Donc je ne crois pas que cela soit ça, je crois que c’est surtout, si vous voulez, la capacité à se réinventer, la capacité à aborder un virage, une rupture. Et là je crois que les Européens ont du mal à négocier les virages étroits et sont plus à l’aise dans les lignes droites. On le voit avec SAP, on le voit avec Nokia, on le voit donc… Je crois que c’est plutôt cela, être capable de tout recommencer, et donc cela, c’est vrai que la mentalité Silicon Valley et… Et puis il y a les start-up, il y a cette espèce de mouvement permanent aux États-Unis, les Américains, je pense, sont plus à l’aise avec des environnements mouvants.

Web TV www.labourseetlavie.com : Alors c’est peut-être la question que l’on sait poser également sur Apple au cours des derniers mois, avec bien sûr la mort de Steve jobs et qu’allait devenir le nouvel Apple sans Steve jobs, est-ce qu’il était… ? Et on a eu ces nouveaux produits qui viennent de sortir et on a vu… on a commencé à voir quelques commentaires en disant : « Il n’y a pas vraiment de révolution », est-ce que le sujet aujourd’hui, y compris pour les investisseurs d’ailleurs, c’est comment Apple va se réinventer aussi ? C’est un vrai sujet ?

Benoît Flamant, Directeur de Gestion Tech de Fourpoints IM : C’est un vrai sujet. Je crois que l’on a toujours dit nous que les 18 mois qui suivaient la mort de Steve jobs, il n’y avait pas de souci parce que Apple était sur la continuité, mais on est au-delà maintenant et il y a des vraies questions. C’est vrai qu’en termes d’innovation, il ne se passe plus grand-chose. Les annonces d’hier sont décevantes. La taille de l’écran, la taille de l’écran, les gens en veulent, que vous aimiez ou pas, c’est comme cela notamment en particulier en Chine. Les gens veulent des grands écrans pour des raisons de pictogrammes et autres et on reste sur la taille d’écran. Cela n’a pas bougé. Le prix on baisse de 100 $, donc 650 à 550, ce n’est pas suffisant à mon avis. Donc oui, il y a quelques innovations, votre empreinte numérique et autres, mais si vous voulez, je pense que l’annonce d’hier été extrêmement décevante.

Web TV www.labourseetlavie.com : Donc cela veut dire qu’il va y avoir à nouveau une pression sur justement comment… sachant que c’est un marché qui se renouvelle effectivement très vite, où il y a des… pratiquement tous les six mois on nous annonce… Donc les consommateurs font une pression très forte auprès de ces constructeurs, est-ce que vous diriez aujourd’hui que c’est Samsung qui a le vent en poupe, qui effectivement est devant au point de vue innovation ?

Benoît Flamant, Directeur de Gestion Tech de Fourpoints IM : Alors, encore une fois, l’innovation, une bonne partie si Google, c’est Androïd, Samsung essaie de rajouter ses couches logicielles avec un succès plus ou moins mitigé, moi je pense que souvent ce sont plutôt des choses qui sont encombrantes, que l’on rajoute sans vraiment valeur ajoutée. Donc cela reste quand même Google qui définit la stratégie et Samsung derrière qui apporte toute la couche matérielle, donc oui, ce duo, à mon avis, va rester pour un bon moment. Alors après, il y a probablement de la place pour des acteurs qui peuvent monter, peut-être Sony, mais je crois que surtout il faut surveiller les chinois. Vous commencez à avoir des marques chinoises, si vous voulez, on n’en parle pas trop parce que elles sont en Chine. Il faut avoir deux chiffres en tête sur la Chine, le segment des Smartphones à moins de 250 $, c’est plus de 70 % du marché en Chine, et la deuxième chose, c’est que la Chine aujourd’hui, cette année, cela va être 35 % du marché. Donc ce qui se passe en Chine est prédominant, et là vous voyez une éclosion de smartphones chinois qui à mon avis vont commencer à envahir, peut-être pas forcément tout de suite l’Europe, mais au moins les pays émergents et qui vont compter. Donc cela, c’est quelque chose qu’il faut surveiller.

Web TV www.labourseetlavie.com : Donc on va avoir des marchés peut-être plus segmentés et il y aura par exemple Apple aujourd’hui n’est pas sur ce marché-là, sur ce segment-là.

Benoît Flamant, Directeur de Gestion Tech de Fourpoints IM : Non, non, le message d’hier est clair, « Non on ne veut pas y aller, on veut rester plutôt en BMW. » Pourquoi pas ? BMW c’est une très belle société, mais Daimler Benz aussi, si vous voulez. Le seul problème c’est que vous devez avoir une stratégie de volume parce que, si vous n’avez pas de volume, les gens qui développent des applications vont arrêter d’aller chez vous. Si vous n’avez plus d’application, les gens vont arrêter d’acheter vos Smartphones. Donc vous avez cette notion d’écosystème qui est drivée par le volume, et ça, je crois qu’Apple ferait bien attention de faire, de suivre cela.

Web TV www.labourseetlavie.com : Effectivement le secteur de ces valeurs technologiques particulièrement en mouvement ce moment avec ces dernières opérations. Merci Benoît Flamant d’avoir fait le point avec nous, on rappelle que vous êtes donc responsable de la Gestion Tech chez FourPoint Investment Manager.

Benoît Flamant, Directeur de Gestion Tech de Fourpoints IM : Merci. 

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