Bourse : Interview Jean-Philippe Lahana Président JPL Finance.
Marchés : Bilan et perspectives après l'été
Marchés : Bilan et perspectives.
Si l’été a réservé des surprises, ce fut sur les marchés émergents, et la stratégie a du s’adapter à cette volatilité.
Nous parlons de l’actualité économique et financière avec notre inivté Jean-Philippe Lahana Président JPL Finance.
Web TV www.labourseetlavie.com : Jean-Philippe Lahana, bonjour. Vous êtes président de JPL Finance. On va parler avec vous de marchés financiers et de perspectives sur ces marchés. Après un été un peu peut-être compliqué, qu’est-ce que vous avez retenu, vous, peut-être pour commencer, de cet été, avec un certain nombre d’inquiétudes après un début d’euphorie, comment vous avez analysé un petit peu ce qui s’est passé sur les marchés ?
Jean-Philippe Lahana, Président de JPL Finance : Écoutez, je crois que la dernière fois que nous nous étions vus j’avais en fait fait la séparation de ce que l’on pouvait appeler le monde micro-économique, c’était celui de l’entreprise, et la macroéconomie c’est-à-dire en fait la recherche de tendances lourdes, alors au niveau des classes d’actifs et des principales classes d’actifs. Je reste toujours un peu dans la même configuration c’est-à-dire que l’analyse globale, aujourd’hui l’analyse macro-économique, qui est relativement pas agréable, est que en fait elle réserve plutôt des mauvaises surprises, ce qui explique d’ailleurs que les marchés soient… je dirais, plafonnent à un certain niveau quand ils ont monté, et que par contre quand ils ont trop baissé, ils rebondissent, ce qui fait que l’on est un peu dans une espèce de trading range, cela tient à un phénomène, enfin deux phénomènes qui s’annulent l’un l’autre, le premier, c’est que l’on est quand même dans une tendance pour les économies développées qui est globalement récessive avec en plus un fait nouveau, c’est que la croissance de l’économie américaine est plutôt plus faible que ce que l’on avait envisagé, alors que tous les moteurs sont plutôt bien allumés, en particulier celui du logement et de la construction, mais cela ne suffit pas à tirer l’économie de façon relativement significative c’est-à-dire que l’on va avoir probablement sur l’année un taux de croissance de l’économie américaine qui sera autour de 2 %, c’est-à-dire que cela fait quand même un bon point de moins que le niveau auquel l’activité permet de réduire ou de régler les problèmes de chômage, les problèmes d’immigration, les problèmes sociaux.
Web TV www.labourseetlavie.com : Avec l’aide de la réserve fédérale en plus.
Jean-Philippe Lahana, Président de JPL Finance : Alors, ça c’est le deuxième facteur, c’est que à partir du moment où l’activité n’est pas suffisamment forte, on est aidé par une politique monétaire qui est très incitative. Ce qui veut dire que quand les marchés montent trop, on se rend compte que finalement la hausse n’est pas justifiée parce que les perspectives de croissance sont relativement faibles, et donc il plafonnent et ils finissent par rebaisser, le trading range globalement c’est de l’ordre d’une dizaine de % en Europe. Aux États-Unis c’est un peu différent, le trading range est un peu plus étroit et les marchés sont plutôt plafonnés entre + 5 et + 10, alors qu’en Europe c’est autour de + 8 et 0. Donc aux États-Unis, la croissance est plus faible et ça c’est un élément, je veux dire, qui explique, à mon sens, ce qui s’est passé dans les économies émergentes c’est-à-dire que les économies émergentes ne sont en fait que le reflet de ce qui se passe dans les économies développées c’est-à-dire que si la croissance des économies développées est faible, il y a une espèce de boomerang sur les économies émergentes qui, elles, supportent de plein fouet la baisse de régime des économies développées, aussi bien celles qui sont productrices de matières premières que celles qui sont émergentes avec une grande dépendance des exportations, et c’est pour cela que l’on a eu des accidents, en particulier en Inde. Mais je veux dire, le marché chinois n’est pas passionnant non plus, et globalement les économies émergentes… La baisse depuis le début de l’année est quand même relativement significative, tous les indicateurs, c’est sûr qu’ils sont exprimés en dollars, donc cela dépend un peu du change, mais quand le dollar a été autour de 1,33-1,3350, on était à des niveaux de baisse qui était de l’ordre de 15 à 20 %. Et alors la baisse des… là où beaucoup d’investisseurs se sont… ne se sont pas rués mais en tout cas se sont intéressés à la dette émergente, là il y a vraiment quelques, je dirais, désillusions et baisses sévères.
Web TV www.labourseetlavie.com : Oui, cela avait été longtemps mis en avant d’ailleurs et cela reste encore mis en avant ce côté « investir sur les pays émergents, c’est là où il y a la croissance », est-ce que de votre point de vue d’investisseur, est-ce que cela veut dire que l’on a peut-être mis un peu trop de côté ce risque émergent qui est toujours là ? On sait que justement il peut y avoir des mouvements de ce type-là, cela a toujours existé au cours des dernières années.
Jean-Philippe Lahana, Président de JPL Finance : Tout à fait. Moi j’avoue que je trouve plus intéressant de regarder les pays émergents à travers les sociétés occidentales qui sont implantées dans les pays émergents. Et vous avez beaucoup de sociétés occidentales, on peut citer des exemples, mais c’est tout à fait la vérité par exemple dans des domaines comme la cosmétique, les affaires comme L’Oréal, les affaires comme Procter et autres, font aujourd’hui plus de la moitié de leur chiffre d’affaires dans les zones émergentes. Donc si on veut profiter du boom des économies émergentes, il vaut mieux s’intéresser à ces affaires que de s’intéresser aux pays. Et donc on en vient la transition c’est-à-dire que, en fait aujourd’hui, la micro-économie, les entreprises, c’est un domaine qui est beaucoup plus intéressant c’est-à-dire que l’entreprise représente d’abord un moyen de s’affranchir des contraintes nationales qui peuvent exister, c’est-à-dire que par exemple aujourd’hui, je veux dire, le pouvoir politique quel que soit le pays, exerce peu d’influence sur une entreprise qui peut délocaliser, réaliser la plus grande partie de son chiffre d’affaires dans d’autres pays, dans des pays qui sont en croissance, voire en forte croissance. Et donc on a, à travers l’entreprise, aujourd’hui une espèce de diversification qui permet d’optimiser son résultat. D’ailleurs ce dont on se rend compte, c’est que les affaires domestiques ont des résultats boursiers, en tout cas des performances boursières qui sont moyennes, voire quelquefois mauvaises, par exemple si on prend le secteur des télécoms, alors que par contre les sociétés multinationales qui ont bien arbitré leurs pôles de croissance ou en tout cas les différents pays sur lesquels elles sont implantées connaissent elles des parcours boursiers qui sont tout à fait significatifs.
Web TV www.labourseetlavie.com : Est-ce qu’il n’y a pas un risque justement… ?
Jean-Philippe Lahana, Président de JPL Finance : Je pense que c’est un phénomène qui va durer.
Web TV www.labourseetlavie.com : Oui, parce que c’était ma question, On se dit « peut-être ces sociétés très internationales, qui ont joué, qui ont vraiment investi sur ces pays émergents, sur la croissance de ces pays émergents », on pourrait se dire on voit un ralentissement en Chine, on voit ce qui s’est passé sur l’Inde, on a vu l’Indonésie, on pourrait se dire peut-être que ces entreprises-là, vu que l’on n’a pas encore la croissance attendue aux États-Unis, ni en Europe, loin de là, elles vont subir, on va dire, au second semestre peut-être un contrecoup de ce qui se passe sur ces pays émergents ?
Jean-Philippe Lahana, Président de JPL Finance : À mon avis ce sera amorti parce que d’abord ce qui se passe dans les économies émergentes, c’est que entre les trois composants que sont la consommation, l’investissement et les exportations, la consommation intérieure a relativement bien marché c’est-à-dire qu’en fait il y a eu une redistribution à l’intérieur de ces pays de la richesse qui fait que c’est le consommateur qui en profite, enfin c’est l’agent économique domestique qui en profite plus, et donc la consommation dans ces pays-là s’est relativement bien tenue. Ce qui a par contre été très touché, ce sont les exportations qui elles représentaient une partie importante du PNB. Donc je crois que l’on ne peut pas passer complètement à travers et je crois que ce phénomène va durer. Alors, l’autre phénomène avec lequel il faut vivre, c’est que les taux d’intérêt court terme vont rester bas pendant pas mal de temps. On est à 0,25 aujourd’hui sur l’Euribor 3 mois, sur l’eurodollar 3 mois, a priori, je veux dire, il n’y a pas de raison que ce taux change ou en tout cas monte significativement avant pas mal de temps. Donc on vit avec des taux d’intérêt court terme, ce qui fait que quand les marchés ont baissé, on se rend compte que finalement on n’a pas d’autres investissements possibles que de chercher des actions et on revient généralement sur ces affaires-là, ce qui fait que d’ailleurs elles sont à chaque fois toujours un peu plus haut et que bizarrement, par rapport à un marché… Si on prend l’indice CAC qui est pratiquement à la moitié de son plus haut historique, il y a quand même un certain nombre d’affaires qui sont elles à leur plus haut historique et qu’elles le dépassent dans tous les cycles de reprise ou de hausse. Enfin, je crois que c’est un phénomène qui va continuer, qui est installé. Maintenant il faut voir aussi s’il n’y a pas des événements extérieurs qui peuvent arriver, qui peuvent survenir. Je crois que le vrai risque ou le grand risque, c’est celui de la panne de croissance c’est-à-dire que l’on peut se retrouver à un moment donné confronté avec la conviction ou l’idée que les économies développées, pour des raisons structurelles, resteront à un niveau de croissance très faible qui sera insuffisant pour payer la dette, qui pourra générer un accroissement du chômage, qui, lui-même, peut générer une baisse de la consommation intérieure. Donc on peut avoir un phénomène de processus cumulatifs, ça c’est tout à fait possible. Il faut être très vigilant sur ce risque, c’est à mon avis le plus important.
Web TV www.labourseetlavie.com : Le risque géopolitique, ça c’est toujours difficile à…
Jean-Philippe Lahana, Président de JPL Finance : Le risque géopolitique, on ne peut pas l’évaluer.
Web TV www.labourseetlavie.com : C’est toujours difficile à évaluer parce qu’on a vu le pétrole qui s’est réveillé un peu…
Jean-Philippe Lahana, Président de JPL Finance : Le risque géopolitique, à mon avis, globalement parlant, il est moins sévère aujourd’hui qu’il ne l’était parce que par exemple on a eu le phénomène du printemps arabe qui a finalement, je veux dire, évolué plutôt défavorablement au sens de l’opposition de ces pays aux économies occidentales, aux pays occidentaux. Je pense que… Et d’autre part le phénomène iranien est peut-être aujourd’hui moins aiguë ou moins inquiétant qu’il ne pouvait être avant les élections du mois de juin. Donc c’est plutôt un phénomène qui est en train de se dissiper et puis on est quand même dans un environnement géopolitique où la domination américaine est totale c’est-à-dire que il n’y a pas aujourd’hui d’opposition, même si de temps en temps il y a une levée de boucliers d’autres pays, je veux dire l’économie, les États-Unis et l’armée américaine sont aujourd’hui incontestablement les gendarmes et les maîtres du monde. Je crois que l’on ne peut pas…
Web TV www.labourseetlavie.com : On reparlera de ce sujet géopolitique effectivement. Merci en tout cas de ce point sur les marchés financiers, Jean-Philippe Lahana, on rappelle que vous êtes donc président de JPL Finance.
Jean-Philippe Lahana, Président de JPL Finance : Avec plaisir.
© www.labourseetlavie.com. Tous droits réservés 2 septembre 2013
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