Bourse - Marchés : Interview de Romain Burnand Gérant Moneta AM.
Actualité économique et financière : stratégie d'investissement
Actualité économique et financière : stratégie d’investissement.
Retour sur l’actualité économique et financière après un été marqué par un certain retour de la nervosité des opérateurs au sujet de la stratégie de la Réserve Fédérale américaine.
Qu’en est-il de la stratégie d’investissement, de la valorisation des marchés, notre invité est Romain Burnand Gérant Moneta AM.
Web TV www.labourseetlavie.com : Romain Burnand, bonjour. Vous êtes gérant chez boulette Moneta Asset Management, on va parler avec vous de marchés et de perspectives sur ces marchés. Commençons peut-être par un petit bilan de l’été puisque l’été n’est pas encore tout à fait terminé sur le plan météorologique en tout cas, pour les marchés comment vous avez analysé ce qui s’est passé ? On a beaucoup parlé des États-Unis et de l’effet de la politique monétaire américaine sur d’autres régions du monde, comment vous avez vécu cette période ?
Romain Burnand, gérant de Moneta AM : Alors, c’est effectivement ce qui a dominé l’été. À partir du 22 mai annonce de la Fed que le « Quantitative Easing » aura un jour une fin. On n’est pas vraiment surpris qu’une situation exceptionnelle trouve une fin, c’est plutôt une bonne chose d’avoir une normalisation, mais inquiétude sur les marchés, quel impact ? Chute des marchés, chute par exemple du CAC 40 de 10 %, on était à 4000 fin mai, on tombe à 3600 fin juin, et aujourd’hui on se retrouve à 4000. Mais tout le monde ne se retrouve pas au même niveau qu’au 22 mai, les pays émergents et certains, et les plus faibles, comme l’Inde, comme le Brésil, ont chuté à la fois au niveau de leur cours de bourse, mais aussi au niveau de leur monnaie, et leurs taux ont fortement monté pour ralentir la baisse de leur monnaie. Donc effectivement les marchés des pays émergents sont des marchés qui sont sous forte pression actuellement, et le marché globalement n’a pas fait d’erreur. Il a eu peur au début, mais finalement il a dit « c’est un non événement pour l’Europe », et puis en plus en Europe, on a été soulagé par le fait que la situation économique ne s’est pas davantage dégradée, elle s’est même plutôt… les attentes étaient extrêmement faibles, donc les surprises ont été positives, et donc le marché s’est dit trois mois après ou quatre mois après non événement. Je pense que l’on aurait pu le dire au moment où cela s’est produit. On n’était pas vraiment sûr… il aurait pu y avoir des accidents, il aurait pu y avoir des pertes importantes dans des banques, il n’y a pas eu cela. Il aurait pu y avoir des nouveaux hedge funds découverts qui avaient pris des positions et qui auraient déstabilisé les marchés, mais clairement c’était peu probable parce qu’on n’est pas dans une ambiance où les financiers ont pris beaucoup de risques. En revanche, tout le monde, de manière moutonnière, est parti dans les pays émergents, c’était une forte certitude. Et la deuxième certitude qui était la certitude des marchés obligataires « rois », c’est une certitude, ces deux certitudes importantes d’il y a un an ont volé en éclats, et le marché le moins aimé de toute la terre qui est le marché des actions de la zone euro, c’est le marché qui sur un an a fait 30 % de hausse.
Web TV www.labourseetlavie.com : C’est la bonne surprise pour les investisseurs qui y étaient sur ce marché-là. Du côté des entreprises, est-ce que, avec ces événements macro-économiques effectivement, les États-Unis qui ne sont pas encore complètement repartis, est-ce que les entreprises tiennent bien encore, tiennent la route ? Est-ce que dans leurs discours que vous avez étudiés de près, est-ce qu’il y a encore de la croissance ? Est-ce que justement les entreprises ont rassuré aussi les investisseurs ou pas ?
Romain Burnand, gérant de Moneta AM : Alors, les entreprises, tout dépendait du niveau des attentes. On a eu une forme de normalisation. Les attentes sur les entreprises fortement exposées aux pays des marchés émergents, liées à la consommation, elles n’ont pas surpris positivement, et certaines d’entre elles, comme Sanofi, solide, a eu une déception par exemple au Brésil. Donc le message des entreprises, c’est, au cours du deuxième trimestre ou sur le début de l’année, il n’y a pas de très bonnes surprises qui viennent des zones émergentes alors que c’est là où on a eu le flot de nouvelles ces trois dernières années, et, en revanche il y a eu quelque bonne surprises sur effectivement des marchés que l’on estimait déprimés, mais où finalement la réalité était moins pire que les attentes, et c’est donc des bonnes surprises relatives. Donc il y a vraiment eu ce recadrage, et du coup dont les valorisations, dont les évolutions de cours, on a une forme de début de normalisation, c’est-à-dire, quand on s’était vu il y a un an, il y avait vraiment deux écarts. Il y avait les grandes sociétés internationales, produits de consommation, très fortement implantées depuis longtemps dans les pays émergents qui avaient un vrai relais de croissance, et même si l’Europe ne croissait pas, ce n’était pas grave parce que c’était largement compensé, et vous aviez des sociétés, éventuellement importantes, historiques, mais qui faisaient l’essentiel de leurs activités dans la zone euro, qui elles étaient sous pression. Dans ces sociétés-là vous avez les banques bien sûr, mais vous avez aussi beaucoup de sociétés de services publics, et puis vous avez aussi quelques sociétés industrielles, des Saint-Gobain et compagnie, et finalement ces deux mondes il y avait vraiment le blanc et le noir, ou du moins l’or et le plomb, et les deux se rapprochent et c’est une forme de normalisation, ce n’est pas anormal. Nous c’était un de nos thèmes d’investissement, de se dire « on va trop loin dans l’écart de valorisation », et c’est vrai que cela a pu permettre de faire de bonnes performances.
Web TV www.labourseetlavie.com : Il y a eu, on parlait de ces pays émergents, des effets devises importants, il y a eu quand même ce type de phénomènes finalement que les entreprises gèrent, les grandes entreprises gèrent, selon vous, ce qu’il y a des nouveaux risques ? On parle de risques géopolitiques en ce moment, est-ce qu’il y a de nouveaux risques qui peuvent apparaître effectivement parce que là on a eu l’impression que les investisseurs sont allés sur les marchés actions, au début par défaut, un peu certains par conviction, mais c’était au départ c’était parce que effectivement on voyait ces taux qui étaient très bas ?
Romain Burnand, gérant de Moneta AM : Vous avez raison, il faut toujours regarder les risques possibles, et on est dans une période où on va les regarder, d’autant plus que la période des nouvelles des sociétés est une période qui va s’achever demain. Toutes les sociétés auront publié leurs résultats à fin août, donc on va passer d’une attention qui était sur une attention société par société à une absence de newsflow importante, et donc une concentration des intentions sur la macro. C’est ce qui s’était passé au mois de mai. Au mois de mai, fin mai, tout le monde se posait des questions sur le quantitative easing et compagnie, et les gens ont eu peur. Le marché a chuté, il y avait un nouveau risque inconnu, c’était pourtant un risque qui était facilement prévisible, alors on ne savait pas quand il allait se prévoir et d’ailleurs le resserrement n’est pas encore arrivé, mais il est pré-annoncé, et du coup le marché tombe et puis les résultats semestriels remettent les pendules à l’heure. Les banques avaient chuté à cette période, et puis finalement le résultat des banques était tout à fait correct et c’était plutôt des bonnes surprises. Et donc, du coup, les cours des banques, après avoir tangué de 10 %, ont monté de 20 % pour les bonnes banques de la zone euro. Donc on retombe aujourd’hui dans une situation où il aura peu de nouvelles micro-économiques, mais il y a les risques, alors tous les risques que l’on connaît aujourd’hui et tous les risques que l’on peut imaginer, et donc on est dans un marché qui est plus mouvementé et compagnie. Je pense que la vraie chose qu’il faut retenir, en tout cas c’est ce qui me guide, moi, dans ma gestion, c’est de se dire on est quand même dans une normalisation, l’économie américaine est repartie, pas aussi tôt, pas aussi fort que prévu, mais finalement les choses se sont mises en place et sont correctement solides. La question que l’on peut se poser, c’est qu’est-ce qui se passe sur l’Europe, et le principal risque c’est effectivement un décrochage d’un pays de la zone euro, bien sûr on pense tous à la France. On a vu des pays qui ont été affaiblis pendant quelque temps par une absence de réformes, par une absence de consensus sur la politique économique comme l’Inde, et l’Inde c’est un pays qui effectivement m’étonnait parce que l’environnement était favorable, et puis tout d’un coup, quand il y a une crise de défiance, alors elle vient de l’extérieur, c’est ce pays-là qui décroche bien davantage que d’autres qui sont plus sains fondamentalement, voilà. Donc voilà les risques, ils sont bien connus, et donc ces risques-là, on ne peut pas les… et nous notre métier ce n’est pas de les prévoir parce que…
Web TV www.labourseetlavie.com : C’est difficile, on ne peut pas, il n’y a pas de boule de cristal…
Romain Burnand, gérant de Moneta AM : Voilà, on peut en discuter des heures, mais si on veut opérationnellement faire des investissements, donc nous conduisent à avoir une stratégie d’un portefeuille équilibré c’est-à-dire équilibré entre des sociétés, si vous voulez, très solides qui ne sont pas soumises par exemple au risque purement zone euro, mais quand même, compte tenu des valorisations, on accepte de prendre des risques, on accepte des noms des sociétés qui ont été délaissées, même si elles ont un peu monté, et bien sûr on pourra en reparler.
Web TV www.labourseetlavie.com : Il y a eu justement parce qu’on a vu aussi dans cette période-là, malgré ces écarts sur les marchés actions, en tout cas sur les indices, on voit des valeurs qui sont à leur plus haut historique en face pour le gérant, ce sont des situations qui arrivent par période effectivement, mais cela pose question sur faut-il encore investir dans ces entreprises-là, cela peut être des entreprises de croissance d’ailleurs dans certains secteurs en croissance, cela pose question quand même quand on voit autant de plus hauts historiques, qu’est ce que l’on fait sur ces marchés actions ?
Romain Burnand, gérant de Moneta AM : Alors, autant de plus hauts historiques, oui et non par ce que historique si on regarde l’ensemble du marché, on est aujourd’hui en France à un CAC à 4000 €, 4000 environ, au plus haut on était à 6000, au plus bas on était à 2400, 2500, donc on est à mi-chemin entre les deux, et donc voilà le marché tel qu’il est. Alors bien sûr il y a toujours des brillantes sociétés qui sont dans des cercles vertueux de développement, ce sont plutôt des grandes mid-cap ou clairement des petites valeurs, et bien sûr l’objectif c’est d’être positionné. Mais je pense qu’il ne faut pas oublier les autres, il ne faut pas oublier celles qui sont en train de faire des progrès, qui ont été… Et moi j’aurais peut-être deux catégories. Malgré leur rebond récent, je mettrai les banques, et les banques ne sont pas clairement dans la catégorie des plus hauts historiques, en tout cas pas les banques européennes, et certainement pas les banques françaises, mais une grosse partie des sujets réglementaires, résultats, activités, funding, enfin financements des banques, sont derrière elles, et leur valorisation est toujours très intéressante. Par exemple la Société Générale, elle a environ 50 € de vrais fonds propres par action, elle cote aujourd’hui aux deux tiers de ce niveau-là. Il n’y a pas de raison, sauf catastrophe, qu’elle n’arrive pas un jour, et ce n’est pas forcément dans cinq ans à 50 €, et entre le cours actuel 50 €, il y a 50 % de potentiel de hausse, vous voyez. Alors il y aura peut-être un peu de volatilité, comme il y en a eu, mais la société vient de 15 €, à 15 € il fallait être courageux pour l’avoir, et à 32, 33 euros, on peut se dire « voilà cela a déjà doublé », mais non, elle était à plus de 100 € en 2007, elle était à 50 € en 2011, elle n’est qu’à 33 aujourd’hui. Donc il faut y aller, ce n’est pas parce qu’une valeur a monté qu’il ne faut pas l’investir. Ça c’est un premier exemple de… Et puis vous avez des sociétés qui, comme les banques qui sont restructurées par elles-mêmes, qui sont dans des phases de forte déception passée, prise de décisions qui n’ont pas été suivies d’effet parce que l’environnement était trop dur, et je pense à Veolia. C’est l’archétype, Veolia, c’est la valeur qui a été une valeur vedette, qui a valu 60 € en 2007, qui avait fait une augmentation de capital à 49 € à cette époque-là, le cours est tombé à moins de 10 €, aujourd’hui ila rebondi, mais il n’est qu’à 11 € environ. Il n’y a pas eu de dilution entre-temps ou très peu, petite dilution de paiement de dividendes en actions, c’est un petit peu agaçant, mais ce n’est pas fondamental, la société a vendu beaucoup d’actifs, le management a été changé. Vous avez eu l’arrivée de quelqu’un qui n’est pas forcément médiatiquement très connu mais qui est l’ancien président du directoire de Norbert Dentressangle, qui est quelqu’un qui a l’habitude de gérer, et avec succès, des sociétés où il faut faire attention à tous les détails, où la valeur ajoutée c’est d’être rigoureux dans son approche, et qui a pris la position de Chief Operating Officer, donc un peu le responsable en charge des opérations dans la société. Donc ça c’est un vrai changement qui s’est traduit par une réorganisation, qui se traduit par une annonce de réduction de coûts, qui ont plutôt l’air d’être, alors ce n’est jamais facile dans les entreprises d’avoir des réductions de coûts, mais de ceux qui ont commencé très tardivement ont une grande marge de manœuvre et peuvent arriver à de grands résultats. Les résultats de réduction sont au rendez-vous…
Web TV www.labourseetlavie.com : Mais il n’y a pas d’effet encore…
Romain Burnand, gérant de Moneta AM : La situation ne s’est pas encore améliorée de manière opérationnelle vraiment, mais c’est vrai que le dernier trimestre, c’était la surprise peut-être de l’été, il n’y a pas eu de nouvelles mauvaises surprises, et dans un environnement où vous n’êtes pas cher du tout, vous êtes un peu le… où il n’y a pas de mauvaises surprises, et plutôt vous avez pris des décisions, vous commencez à les mettre en place, il y a des chances qu’elles portent leurs fruits et si en plus vous êtes aidé par la conjoncture, c’est le pactole. Alors on ne va pas parier là-dessus, mais c’est… Voilà, à conjoncture étale, on a des perspectives de progression, comme la société a déçu depuis des années, les gens ne se sont pas rués sur l’idée, mais là ce n’est pas une société qui est au plus haut, il faut bien le dire, elle est même un cinquième de son prix d’il y a sept ans, mais c’est une société qui est une ligne importante du portefeuille, des portefeuilles que nous gérons.
Web TV www.labourseetlavie.com : Voilà des exemples concrets. Merci d’avoir fait le point avec nous, Romain Burnand, on rappelle que vous êtes donc gérant chez Moneta Asset Management.
Romain Burnand, gérant de Moneta AM : Merci
© www.labourseetlaviecom. Tous droits réservés 31 août 2013.
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