Débat économique sur le Financement des PME avec Daniel Karyotis (Banque Palatine) et Christian Poyau (Micropole) : 2ème partie .
En fil rouge, Yves Maillot Directeur des Investissements et Gestion Actions Robeco Gestion
Financement des PME, Economie et perspectives dans notre magazine « l’Economie en VO ». Dans ce magazine de débat économique sur la Web Tv www.labourseetlavie.com, nos trois invités pour parler Economie, Financement des PME/ETI, stratégie d’entreprises, banque…, sont :
– Daniel Karyotis Président du Directoire de la Banque Palatine (partenaire de ce magazine) et qui a écrit récemment « La France qui Entreprend » chez Democratic Book.
– Christian Poyau Président de Micropole société des technologies
– En fil rouge, Yves Maillot Directeur des Investissements et Gestion Actions Robeco Gestion. Dans cette deuxième partie, nous entamons les questions qui se posent sur le financement des PME et le rôle des banques avec cette situation de crise dans la zone euro.
Web TV www.labourseetlavie.com : Daniel Karyotis, vous avez écrit ce livre « la France qui entreprend » avec un certain nombre d’exemples d’entreprises qui ont réussi notamment à l’international. Dans cette période, il y a des tentations pour les entreprises de se dire : « finalement on va essayer, vu ce qui se passe dans la zone euro, on va peut-être essayer d’aller voir d’autres marchés » il faut aussi qu’elles soient accompagnées dans ce cas-là ?
Daniel Karyotis : Vous savez, il y a beaucoup d’entreprises qui ne se le disent pas aujourd’hui, elles le font déjà parce qu’en réalité on aperçoit ou on s’aperçoit qu’il y a une dichotomie croissante entre les entreprises françaises qui sont plutôt marché domestique et qui souffrent parce que notre pays quand même ne va pas forcément connaître une croissance très forte sur les cinq prochaines années, et celles qui l’ont quand même anticipé depuis très longtemps et qui ont parfois des parts de chiffre d’affaires à l’export très largement supérieures à 50 %, et parts à l’export souvent d’ailleurs dans les pays d’Amérique Latine ou en Asie. Et ces entreprises-là connaissent encore aujourd’hui en 2011 des croissances de chiffre d’affaires à deux chiffres.
Donc, bien sûr, ce que nous connaissons aujourd’hui en Europe, cela ne peut être qu’un accélérateur et c’est la raison pour laquelle je pense que on voit bien aujourd’hui que la France est multiforme. Donc il ne faut pas dire que l’environnement économique en France est cataclysmique. Cela peut être vrai sur certains secteurs mais vous avez aussi aujourd’hui des entreprises qui se portent bien et qui effectivement lorsque vous le disiez elles attendent aussi de leurs partenaires bancaires que l’on puisse toujours les accompagner dans leur développement à l’international ou dans leurs besoins de financement.
Web TV www.labourseetlavie.com : On l’a dit, on le dit souvent dans cette période de crise, comme en 2008, les banques réduisent leurs financements aux entreprises, vous vous dites pour le cas de la Banque Palatine que ce n’est pas le cas. Est-ce que les entreprises qui viennent chez vous ou qui viennent vous contacter, qui ne seraient pas clientes chez Palatine ont des chances d’obtenir des financements ?
Daniel Karyotis : Bien sûr, la réponse est oui. Mais vous savez, même pour les banques en général, je pense qu’il faut dissocier deux choses. Il y a la réduction de la taille des bilans de toutes les banques qui est indispensable, et puis, en réalité, l’épicentre qui sera donné me semble-t-il par les banques pour le financement des économies nationales, en l’occurrence de l’économie française. Que les grandes banques annoncent des réductions de taille de bilan et qu’elles réduisent par là-même des financements internationaux, ce n’est pas gênant pour l’économie française.
Donc il ne faut pas avoir peur quand les banques annoncent qu’elles vont réduire leur taille du bilan pour faire face aux exigences de fonds propres qui aujourd’hui leur sont demandées. En même temps, je pense que des banques, depuis 2008, ont compris que leur mission principale, leur mission première, c’était le financement de l’économie nationale. Donc c’est vrai pour les banques, c’est vrai pour Palatine puisqu’en 2011 d’ailleurs on va encore connaître une progression de l’encours assez significative.
Encore faut-il simplement que les demandes soient des demandes de financement qui soient axées sur des projets de développement, que les entreprises aussi aient quand même de bons fondamentaux, donc derrière il y a un projet et quand il y a un projet qui est fiable, quand il y a un projet qui est solide, bien sûr nous continuons à les financer aujourd’hui comme on le faisait il y a quelques mois.
Web TV www.labourseetlavie.com : La crise vous a quand même amené à changer, à être peut être plus vigilant sur des dossiers comme des entreprises peuvent l’être d’ailleurs pour des acquisitions ?
Daniel Karyotis : Oui mais c’est normal. Si je vous disais qu’un banquier aujourd’hui n’est pas plus vigilant, on regarde les comptes d’entreprise, vous me diriez que je ne suis pas dans mon rôle. Donc on l’est déjà depuis 2008, vous l’avez indiqué effectivement, depuis 2008, on a un peu changé de monde. Donc on regarde les indicateurs et c’est notre rôle, mais à partir du moment où l’entreprise a des projets solides, qu’elle soit cliente de la banque aujourd’hui ou peut-être un prospect, on continue bien sûr à les accompagner, c’est notre raison d’être, c’est notre valeur ajoutée.
Web TV www.labourseetlavie.com : Christian Poyau, vous avez été Président de Croissance Plus il y a quelques années de cela, il s’agissait des entreprises de croissance, il y a un besoin particulier pour les entreprises de croissance de financement ?
Christian Poyau : Oui bien sûr, la croissance cela passe mécaniquement par, comment dire, disposer de ressources financières, que ce soit pour effectivement racheter des entreprises, développer de nouveaux marchés, etc. Je suis tout à fait d’accord avec ce qui vient d’être dit, c’est-à-dire que les entreprises qui aujourd’hui ont des bons fondamentaux, ont des projets intéressants, peuvent sans problème, en tous les cas trouvent tout à fait normalement du financement. Maintenant ce qu’il faut c’est toujours être le plus large possible, il y a des fois des entreprises qui démarrent et là le projet n’est encore qu’une perspective, c’est la plus compliquée. Les marchés financiers, la bourse aujourd’hui est malheureusement un marché qui est complètement atone pour tout un tas de raisons que l’on pourrait évoquer éventuellement. Donc le problème du financement, si il fonctionne encore dans certains cas et pour certains types d’entreprises, s’est quand même réduit d’une manière générale et effectivement c’est problématique pour les entreprises de croissance en particulier.
Web TV www.labourseetlavie.com : Donc il faut trouver d’autres modes de financement avec des fonds d’investissement, avec quels types de financement ?
Christian Poyau : Il faudrait surtout que l’on aligne la fiscalité par rapport au risque. On est dans une période très compliquée, donc tous les Français, nous en l’occurrence aussi, notre épargne on cherche à la placer avec la meilleure sûreté possible ou en tout cas avec le meilleur avantage fiscal possible. Aujourd’hui en France, et dans beaucoup de pays, le placement le moins risqué c’est l’immobilier et, alors là on a du mal à comprendre, la fiscalité est aussi avantagée pour l’immobilier et les actions, Micropole c’est une action j’espère qui a beaucoup de temps devant elle, mais enfin c’est mécaniquement plus risqué que d’acheter un studio dans le VIIIème arrondissement bien évidemment mais la fiscalité est la même, voire même plus négative sur Micropole. Créons un « Scellier » Action c’est-à-dire une fois pour toutes orientons la fiscalité vers ce qui permet de développer du business. Là il y a une action des pouvoirs publics à mener qui serait à mon avis très positive.
Web TV www.labourseetlavie.com : Donc, au-delà de toutes les mesures que l’on a pu voir sur l’ISF par exemple, sur les défiscalisations pour une certaine catégorie de français ?
Christian Poyau : Il n’y a pas qu’un seul levier, ce serait trop simple si on trouvait le levier à actionner de manière générale, c’est tout un tas de choses. Là aussi c’est une notion de perspectives, c’est ce que l’on disait tout à l’heure, la dette, il faut que les États réduisent leurs dépenses, il faut que l’on réduise le coût du travail, il faut que l’on réoriente la fiscalité vers ce qui crée des emplois, cela ne veut pas dire qu’il faut faire disparaître l’immobilier, simplement il faut mettre l’accent sur ce qui crée des emplois et encore une fois des créations d’entreprises il y en a, il y a plein de gens qui ont des idées, des projets, il y a plein de choses à faire.
Web TV www.labourseetlavie.com : Vous parliez de la bourse, elle ne joue plus son rôle aujourd’hui ? Alors il faut dire que depuis 2008 avec les crises qui se sont succédées, mais sur cette partie-là, small mid caps, on n’est pas loin des ETI cotées, il y en a certaines qui sont cotées, il y a un problème de financement ?
Christian Poyau : Oui bien sûr. Elle ne joue plus son rôle. Si je prends juste pour illustrer l’exemple de Micropole, nous on est entré en bourse en 2000, on faisait 10 millions de chiffres d’affaires, aujourd’hui on en fait plus de 100 millions, donc en 10 ans on a fait x 10 parce que l’on a pu lever de l’argent en bourse et puis à partir de là, mener un certain nombre d’opérations d’acquisitions. Aujourd’hui rentrer en bourse est quasi impossible ou dans des cas vraiment très très précis, et faire des opérations secondaires c’est-à-dire d’augmentation de capital, là aussi est complètement impossible du fait de la valorisation des entreprises. Donc la Bourse aujourd’hui est quasiment atone pour les second caps et même d’ailleurs c’est très compliqué pour les grandes entreprises.
Plusieurs raisons à cela, il y a bien sûr le contexte économique international et là il n’y a pas de levier pour jouer rapidement dessus. Par contre, il y a aussi des contraintes au niveau réglementaire, au niveau de l’AMF qui continue à considérer que les grandes entreprises sont comme les ETI, et puis également du point de vue de l’opérateur de marché, Nyse Euronext en l’occurrence qui devrait évoluer sur un certain nombre de choses. Il y a quand même donc des actions concrètes à faire. Moi pour ma part, j’ai milité pour la création d’un fonds dédié à Alternext qui a été repris avec la Caisse des Dépôts et je salue Augustin de Romanet sur ce sujet-là qui a été repris également par le Premier Ministre Fillon, et qui donc devrait être annoncée j’espère début décembre pour encore une fois injecter un petit peu d’épargne et orienter l’investissement des Français vers les marchés boursiers des entreprises de croissance.
Web TV www.labourseetlavie.com : Daniel Karyotis, sur ces ETI que vous avez largement expliqué dans votre livre, leur développement, la bourse est un des moyens pour elles aussi d’accélérer la croissance dans un contexte qui n’est pas facile ?
Daniel Karyotis : En réalité je pense que, comme vous l’indiquiez, il y a plusieurs leviers en tant que tels. Tout d’abord c’est de trouver un renforcement en amont des fonds propres, un renforcement des fonds propres cela peut en réalité passer par des fonds, des fonds privés, des fonds publics via le FSI. Après effectivement il y a toujours l’introduction en bourse, même si le contexte depuis, je dirais moi 2000, on a dit 2008 mais je pense quand même que la bourse, la première cassure pour la bourse, c’est quand même 2000-2001, c’est quand même un peu plus difficile. Et puis après vous avez l’accompagnement bancaire qui reste toujours un levier. J’ajoute aussi également dans ce contexte un peu compliqué que je pense qu’il faut qu’on travaille sur des nouveaux produits de placement pour les particuliers. Parce qu’aujourd’hui quand des clients viennent nous voir dans le contexte que l’on peut connaître, quand on leur dit : « l’assurance-vie parfois c’est compliqué, les obligations d’État attention il y a des risques, les actions je n’en parle pas, l’immobilier peut se retourner », il faut bien trouver des placements pour proposer à cette clientèle. Et un des produits aujourd’hui qui commence à monter, c’est le Private Equity, c’est-à-dire en réalité des participations dans des entreprises parce que beaucoup de nos clients, parfois chefs d’entreprise ou anciens chefs d’entreprise, nous disent : « moi, si il y a un placement que je connais bien, c’est en réalité l’investissement direct ou indirect dans les entreprises » et je pense que cela peut être aussi une des voies de diversification de placement que l’on peut demain peut-être proposer à notre clientèle.
Web TV www.labourseetlavie.com : Cela, c’est le genre de choses qui vous intéressent en réorientant en quelque sorte l’investissement vers
les entreprises ? Alors cela demandera sans doute de la pédagogie, de la transparence aussi de la part des chefs d’entreprise.
Daniel Karyotis : Oui, de la communication, mais on disait tout à l’heure comment les Français avaient placé leur épargne aujourd’hui ? Et c’est vrai que c’est très très compliqué. Mais moi je considère que aujourd’hui si on analyse bien, si on connaît bien le marché des entreprises, il peut être, il est beaucoup plus intéressant de se positionner dans certaines entreprises plutôt que dans certaines obligations, des OAT ou d’autres pays en tant que tels. L’entreprise reste une valeur, enfin la terre a continué de tourner, on va continuer à manger, on va continuer à produire, on va continuer à se déplacer, donc à partir du moment où l’entreprise est sur un marché porteur, qu’elle est bien gérée, bien pilotée, qu’elle a des projets de développement en tant que tels pour des investisseurs cela peut être un excellent moyen de placer son épargne.
©www.labourseetlavie.com 15 novembre 2011. Tous droits réservés.
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