Les Licornes tricolores se distinguent faut-il s'en réjouir ? - Les chiffres impressionnants de l'emploi américain, le monde d'après, pas si simple.
L'info éco + avec Didier Testot Fondateur de LA BOURSE ET LA VIE TV sur Sud Radio (23 janvier 2022)

23 janvier 2022 11 h 48 min
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L’INFO ECO + avec Didier TESTOT FONDATEUR DE LA BOURSE ET LA VIE TV

#SudRadio] 🔴 Cette semaine, Didier TESTOT revient dans l’info éco + avec Jean-Marie Bordry sur les thèmes suivants : 

L’emploi aux Etats-Unis et les signes de pénuries pour les entreprises qui s’accumulent

Les Licornes à la fête en France, faut-il s’en réjouir ?

Didier des chiffres impressionnants aux Etats-Unis sur l’emploi mais l’Europe pourrait aussi être concernée.

C’est bien entendu lié à la crise Covid et ses conséquences. Les derniers chiffres publiés dans ce domaine montrent après une année d’augmentation mensuelles massives d’offres d’emploi a finalement atteint un pic. Et désormais il y autant de postes disponibles que de chômeurs. Le BLS Bureau du Travail Américain a indiqué qu’il y avait 3,7 millions d’emplois vacants de + que de chômeurs en novembre. Et un point retient l’attention de certains spécialistes le nombre de démissions, qui a augmenté de façon inattendue pour atteindre un niveau record, avec une hausse de 370 000 en novembre pour atteindre le chiffre record de 4,527 millions. Les plus fortes hausses ayant été observées dans l’hébergement et les services de restauration (+159 000), les soins de santé et l’assistance sociale (+52 000), ainsi que les transports, l’entreposage et les services publics (+33 000).

Pourquoi les Américains ne veulent-ils pas revenir au travail ?

Risques sanitaires liées à la Covid d’abord, retraite anticipée / risque d’aller au travail. Garde d’enfants compliquées, réorientation, 1 sur 4 se préparerait selon une enquête à chercher un nouvel employeur après la pandémie.  Et plus de 40 % des personnes ayant répondu au Work Trend Index de Microsoft, une enquête mondiale menée auprès de plus de 30 000 personnes dans 31 pays, avaient déclaré envisager de quitter leur employeur en 2021/2022

 Et les conséquences pour l’économie vont-elles se faire sentir ?

Oui avec tout d’abord le sujet de l’inflation avec la pénurie de main d’œuvre, l’approvisionnement des usines pourrait être + compliqué, cela fait repartir les salaires à la hausse dans de nombreux secteurs. Et moins de productivité, + absentéisme, c’est moins de rentabilité. Et si je parle de ce qui se passe aux Etats-Unis aujourd’hui, c’est qu’il ne faut pas se dire que l’Europe va échapper à ces phénomènes.

Robert Habeck le Ministre de l’Economie allemand a dit « l’Allemagne a besoin d’une immigration à grande échelle pour éviter de graves pénuries de main d’œuvre » 300.000 voire 1 million d’emplois pour éviter les pénuries. Les Allemands sont pragmatiques. Nous sommes en campagne électorale, période d’incantations fumeuses, l’économie elle ne ment pas, ce sujet du manque de personnel est un sujet majeur pour nos pays. Il y a derrière cela bcp plus que le seul prix à la pompe de l’essence que l’on voit en ce moment. Et à côté Ibiza c’est du pipi de chat

Cette semaine vous revenez sur ce qu’on appelle des licornes, ces jeunes entreprises qui lèvent beaucoup d’argent

La startup basée dans les Hauts-de-France qui s’appelle Exotec a levé 335 millions de dollars (293 millions d’euros) auprès d’un fonds américain pour développer ses petits robots destinés aux entrepôts. Cela la valorise à 2 milliards de dollars (1,75 milliard d’euros) et lui permet de devenir la 25è licorne de la French Tech (la 24è active). L’objectif de cette entreprise est de construire des entrepôts entièrement robotisés avec plusieurs robots spécialisés tous reliés par ses logiciels propriétaires. Exotec envisage ainsi de multiplier son chiffre d’affaires par…10 d’ici à 2025 pour atteindre à cette date 1 milliard d’euros.

Voilà pour les chiffres, et il faut préciser donc que c’est la première licorne industrielle, les autres sont issues du numérique.

Et donc une licorne pour ceux qui nous écoute, même si on en voit de plus en plus sur les plages sous forme de bouée pas toujours pratiques, c’est une start-up qui a une forte croissance, qui innove, et cette croissance rapide est financée par des fonds extérieurs, avec une valorisation supérieure à 1milliard, vous avez ce statut. Il faut le dire aujourd’hui en France depuis quelques années ces entreprises trouvent plus facilement des fonds et plusieurs d’entre-elles font des beaux parcours.

Didier, doit-on se réjouir de ces annonces ?

 Sur le fond oui cela veut dire que nous avons su créer un écosystème en France. Alors forcément comme cette ambition de la « start-up nation » est une initiative encouragée largement par Emmanuel Macron, lui et son Ministre de l’économie numérique se sont félicités de cette annonce. L’objectif du Président est rempli avec trois ans d’avance. Et il est vrai que la place prise par l’écosystème de la « French Tech » commence à être visible dans la vie de tous les jours est visible. Doctolib, BlaBlaCar (mobilité) , Deezer (streaming dans la musique), Back Market (tel reconditionnés) , ou encore Vestiaire Collective (achat revente de vêtements) sont des noms connus. Sans oublier OVH Cloud qui lui est désormais en Bourse. Prochain objectif 2030 d’Emmanuel Macron parvenir à avoir 10 géants de la tech en Europe. Là on parle de valorisation de 100 milliards de dollars. Mais aujourd’hui sur les dix plus grosses entreprises mondiales, 8 sont dans la tech, mais aucune n’est Européenne. L’écosystème tricolore est là, il se développe, d’autres viendront, mais je vous disais OVH est la seule qui est en Bourse désormais, et quand vous demandez les comptes de BlablaCar, la communication vous dit « la société ne communique pas son chiffre d’affaires ni sa rentabilité », le chemin est encore long pour faire de ces licornes des entreprises « normales ».

Mais Didier qui finance ces entreprises ?

C’est sans doute là que la bât blesse et je vais vous expliquer pourquoi. Là pour Exotec, on retrouve  Goldman Sachs Asset Management, aux côtés du fonds Large Ventures de Bpifrance et de son investisseur historique 83North. Et c’est souvent le cas, même si nous manquons de données, certains spécialistes avancent autour de 30% de fonds étrangers à chaque fois. Et qui dit fonds étrangers dit sujet pour les années qui viennent. Car quand vous avez financé une entreprise ce n’est pas uniquement pour les beaux yeux des dirigeants ou pour faire plaisir à la France, c’est que vous trouvez cette entreprise intéressante, soit pour revendre votre participation à un autre fonds, ou à un actionnaire, groupe…Et dans votre intérêt uniquement. Et forcément si vous êtes celui qui a mis le plus d’argent sur la table, il est probable que vous choisissiez les Etats-Unis par exemple ensuite pour développer la startup. Et la question se pose donc du rôle de BPI (Banque Publique d’investissement) qui est aussi dans toutes ces opérations si au final cet argent sert les intérêts d’investisseurs étrangers plus que ceux des Français. Ce débat n’a jamais lieu, je le regrette, il est pourtant capital pour notre économie. Alors oui l’on peut se dire que la France, ce n’est que 67 millions d’habitants, marché trop petit pour devenir un leader mondial, percer aux Etats-Unis est capital bien entendu, ou en Asie.

Mais on peut aussi réfléchir aux moyens, au fameux « flêchage » mot adoré par nos énarques de l’argent Français pour que nos licornes transforment leurs levées de fonds en développements économiques dans nos territoires. Que cela soit pour la R&D ou pour leur futur siège social.  Autre débat essentiel également je le dis ici celui du profil des dirigeants de ces licornes, des hommes, là aussi trouver des solutions pour que des femmes soient financées comme les hommes reste un défi.  Et il faut aussi arrêter de se réjouir d’une levée de fonds, l’argent n’est pas tout, ce qu’on en fait est essentiel, aujourd’hui le déficit que nous avons vis-à-vis de l’Allemagne, je le rappelle ici concerne les ETI (Entreprises de Taille Intermédiaires) celles qui vont à la conquête du monde, et là je n’entends toujours rien, la mode des start-ups c’est bien, une ETI Nation serait un vrai changement pour la France et nos territoires.