Par Didier Testot, fondateur de LA BOURSE ET LA VIE TV
Cela fait désormais plus de 32 ans que je vis ma vie de journaliste et depuis 12 ans celle d’un entrepreneur média toujours en compagnie des dirigeants d’entreprises, notamment ceux qui ont choisi la Bourse.
Si cette vie n’était pas prévue initialement comme cela, le hasard y est souvent pour quelque chose. Cette rencontre avec Luc Demeulenaere qui dirigeait le service Bourse du Figaro en 1989 fut capitale. Alors que je lui rappelais mon parcours (Faculté de Droit de Nice et Maitrise de Science Politique à la Sorbonne) et mon ignorance de la Bourse, il me dit « Didier vous apprendrez sur le tas ». Et c’est ce que je fais depuis cette date, avec mes rencontres de dirigeants de PME, d’ETI et parfois du CAC40.
Mais ceux qui m’ont le plus impressionné au cours des dernières années, ce sont bien les patrons d’entreprises moyennes, qu’ils aient réussi ou soient en train de le faire pour devenir des ETI (Entreprises de Tailles intermédiaire).
Sans doute que la crise sociale des Gilets Jaunes m’a encore plus rapproché d’eux. Car ces dirigeants sont souvent basés dans les régions. Et c’est là qu’ils se battent pour développer leurs entreprises, franchir certaines barrières administratives ou réglementaires. Je suis admiratif de ce qu’ils entreprennent.
En 2021, je suis allé à Saint-Etienne voir l’un d’entre-eux, et son accueil, ses explications sur ce qu’il était en train de faire vaut tout l’or du monde pour comprendre l’économie et ce que l’Etat omniprésent dans notre pays devrait faire pour changer les choses.
Prendre le parti des dirigeants d’entreprises ? Avec le niveau des débats actuels en France, il est sûr que je risque de me faire traiter de vilain libéral.
Mais moi à la différence de beaucoup d’intervenants professionnels des plateaux TV, j’ai aussi osé créer mon entreprise en 2008, l’année de la crise financière mondiale qui se profilait pour en octobre 2008 faire trembler la planète (Lehman Brothers). Je sais ce que cela veut dire, de joies et de peines, de nuits difficiles, de crises, celui qui n’a pas essayé ne peut me juger.
Aux commentateurs professionnels des plateaux de désinformation TV, je dirais simplement. Faites comme moi, créez votre entreprise, faites travailler des salariés ou des équipes pour des projets, voyez ce que l’on vous demande, le montant des charges, les barrières à l’entrée, voyez l’énergie physique que cela exige, essayez de tenir plus que trois ans, sans aucune aide extérieure. Et pour moi dans un marché anticoncurrentiel (avec des médias qui sont aidées par l’État et nos impôts). Moi je n’ai jamais reçu un centime de l’État. Et en douze ans, j’ai réussi contre tous les pronostics à créer une marque désormais reconnu par les investisseurs professionnels comme particuliers.
C’est un financier, spécialiste du capital investissement qui autour d’un café m’a dit : “Didier c’est courageux ce que tu as fait, peu de gens osent, bravo». J’ai eu du mal à accepter ce compliment, mais il m’a fait du bien, car quand on a le nez dans le guidon, on est avec ses doutes, mais pas toujours avec l’énergie nécessaire. Et on a du mal à mesurer sauf par les mauvaises nuits, ce qu’on a entreprise et comment ce travail est perçu.
Qui remercie ceux qui prennent des risques ?
Un rappel utile, ce sont ces entreprises qui créent de l’emploi, ce sont les PME et ETI qui seules peuvent le prétendre. Et je garderai toujours en tête cette image qui n’a pas fait les délices des magazines people. Je ne peux oublier ce patron d’un groupe qui fait désormais plus de 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires, et qui a créé son entreprise dans les années 70. Lors d’un déjeuner, il m’a dit « Didier, j’ai fait plusieurs pontages cardiaques, je vais laisser l’entreprise à mes enfants et prendre du recul ». Et quelques années plus tard, lorsque je l’ai salué, il sortait difficilement de sa voiture, avec une cane, complètement affaibli par sa vie de chef d’entreprise. Ce dirigeant est décédé en 2022 sans qu’aucun JT n’en parle. Respect toujours et admiration pour ceux qui prennent des risques.
Voilà pour le décor.
Les débats politiques actuels sont désespérants, tout le monde en convient, mais ils nous sont livrés comme des commandes Uber Eats, à la pelle, sans que rien ne change par des professionnels de la politique qui font semblant de ne pas voir ce qui se passe dans la vie réelle des Français.
Une énième campagne électorale, avec deux thèmes Sécurité et Immigration, ceux que l’extrême droite promeut depuis ses fondations, alors que notre Monde change à vitesse grand V. Emmanuel Macron qui avait soulevé de l’espoir du monde économique sur sa compréhension des enjeux a déjà largement déçu. Même si l’emploi se porte mieux aujourd’hui qu’il y a cinq ans. Comme ses prédécesseurs, il avait un programme, des propositions nouvelles, mais au final il n’a pas renverser la table pour changer le logiciel énarchique. Un énarque de plus qui a su arriver au pouvoir et qui n’a pas redonné espoir aux Français d’un monde meilleur. La crise sanitaire et sa gestion n’explique pas tout car les oppositions n’auraient pas forcément fait mieux. Et l’Ukraine vient ajouter une crise économique majeure avec l’inflation qui s’était déjà installée. À force d’avoir habitué les Français à la médiocrité, les Français ont perdu toute confiance dans les politiques et pour une grande partie, renverser la table serait la seule solution avec des extrémistes qui enfonceraient encore plus la France !
Paradoxe Français mais aussi de beaucoup de démocraties. Comme si une bonne dictature pouvait régler leurs problèmes !
La vraie question est celle-ci : Est-il possible d’éviter le déclin de la France si les politiques en restent à leurs anathèmes plutôt que de s’attaquer aux vraies faiblesses économiques du pays ?
J’ai eu un grand père qui a rejoint Londres depuis Dunkerque avec le Général De Gaulle, deux arrières-grand-pères qui ont combattu tous les deux sans le savoir à Verdun. Je ne peux me résoudre à voir les héritiers de ceux qui ont ruiné la France prendre le pouvoir sur la base d’une nouvelle escroquerie intellectuelle, faire croire que l’extrême droite c’est De Gaulle ! Sa DS porte les traces des forfaits des collabos.
Mais les erreurs économiques depuis 50 ans nous affaiblissent dans la compétition internationale.
Nous sommes dans un monde économique ouvert, personne ne pourra remettre des frontières alors que nous sommes tous connectés. Ce qui change c’est que la mondialisation que nous avons connue, connaît des ratés, et c’est une opportunité pour notre pays et ses entrepreneurs de démontrer leur savoir-faire. Si nous permettons l’innovation, si nous sommes compétitifs, si l’écosystème de nos entreprises devient une priorité pour se battre à l’international, alors oui, nous pourrons vaincre le déclin. Et redonner de l’espoir. Pas pour quelques-uns, pour tous, pour nos enfants, à qui nous laissons un monde en vrac, à bout de souffle, égoïste, et qui va au devant de catastrophes répétées et sans issues. Sauf à comprendre que nous ne sommes qu’une espèce qui détruit la planète sur laquelle elle vit en cohabitation avec d’autres espèces, pas plus intelligente contrairement à ce qu’elle pense car pourquoi ce qui était déjà écrit dans les années 70 sur les catastrophes écologiques en cours n’a reçu aucune marque d’intérêt. S’il ne s’agissait pas juste de gagner une élection mais de se projeter dans la durée, exactement ce que fait un dirigeant d’entreprise, nous aurions déjà trouvé des solutions nouvelles pour un monde plus équilibré. Quand des millions de personnes changeront de continent à cause de famine ou d’inondations, ce ne sont pas des murs qui les arrêteront. Ni aucune armée si puissante soit-elle. Ni un petit démagogue. L’Histoire de la planète est marquée par ses mouvements de population.
J’aurai envie qu’un dirigeant d’entreprise moyenne vienne nous livrer ses recettes, pour une fois, avec ses idées, ses convictions de chef d’entreprise, quelqu’un qui sait ce veut dire “non” de la part d’un banquier au début de son aventure, quelqu’un qui a vu les freins, les blocages, les réseaux, les empêcheurs de croissance, et qui peut poser un diagnostic basé sur la réalité, et non sur des fantasmes.
Alors forcément il ne faudrait pas qu’il témoigne à visage découvert. En France, être indépendant des pouvoirs, politiques, économiques, cela se paye très cher. L’économiquement correct existe aussi !
Notre pays est sclérosé par un système qui se partage les fromages, comme les parts du « Trivial Pursuit », mais à mesure que la dette gonfle, que les Français s’appauvrissent, le fromage se réduit. Un dirigeant d’entreprise qui l’ouvre peut vite se faire fermer le clapet par l’élite incompétente mais qui veut garder le pouvoir. Quand un dirigeant d’entreprise moyenne m’explique qu’il a essayé de proposer à un grand groupe de créer une entreprise d’envergure mondiale sur son secteur. Mais que le dirigeant de la filiale du grand groupe en question lui expliquer qu’il ne veut pas, et que de toute façon, il a un moyen de pression sur le Pdg du CAC40. Et donc ce leader tricolore ne verra jamais le jour à cause de ce blocage. Oui c’est la réalité de notre pays, cela ne fait pas la Une des journaux.
Comment une telle chose est possible dans le Pays des Lumières où Liberté figure en bonne place. Les élites françaises se moquent de l’Italie, la France dispose d’une plus grande mafia invisible, mais réelle qui empêche les entrepreneurs, les vrais, d’avancer.
Les Français devraient s’intéresser à ces entreprises, à leurs dirigeants, car il n’y a aucune raison qu’un énarque d’extrême droite dessine la France des prochaines années. Les énarques de gauche ou de droite et ont déjà bien montré leur incompétence, ceux d’extrême droite sont en embuscade pour ruiner le peuple Français, une fois de plus, en creusant la dette au lieu de se creuser la tête comme dirait Alain Souchon.
La France a tout essayé ?
Non elle n’a jamais essayé de gérer l’État omnipotent et “si efficace”, comme une entreprise moyenne, la crise du Covid l’a démontré une fois de plus, alors que les Français sont les plus imposés du Monde. Une entreprise qui elle ne peut se permettre des erreurs car elles sont mortelles. Et si l’on gérait l’État comme une PME ou comme une ETI, un État qui serait efficace pour les Français et notre économie ? La seule solution pour éviter de sombrer définitivement dans les 30 prochaines années ?
Je ne me résous pas à devoir choisir entre le pire et le moins pire. Je voudrais voter pour un avenir meilleur et fraternel.
Les GiletsJaunes avaient pu montrer au début du mouvement leur vision du ras le bol fiscal, ils avaient vu juste, mais leur mouvement a vite été décrédibilisé pour mieux enterrer ce sujet. Et pourtant il suffit de demander à une entreprise française la différence de marge entre un pays comme le Canada aussi développé que nous et la France par exemple, pour s’apercevoir que cela ne tourne pas rond chez nous.
Notre pays a besoin d’une révolution économique pour que la fracture créée par 50 ans d’amateurisme ne finisse pas en guerre civile aux bénéfices de quelques-uns. Les crises n’ont jamais aidé les plus démunis. Et parmi les sujets qui aideront les chefs d’entreprises, la souveraineté numérique qui est la clé pour les aider dans la compétition mondiale qu’ils vivent au jour le jour et dont ils savent qu’elle est inégale, car les plateformes numériques aujourd’hui ne sont ni françaises ni européennes, mais américaines ou chinoises.
Informez-vous sur les entreprises, parlez avec les dirigeants comme je le fais depuis plus de 20 ans, informez-vous pour comprendre l’économie et ne plus subir les recettes d’une élite incompétente dont seule la couleur change, mais pas l’incompétence économique.
Comprendre l’économie avec ceux qui la font, pour comprendre l’évolution du Monde.
Comme le dit Albert Einstein « Il ne faut pas compter sur ceux qui ont créé le problème pour le résoudre »
Et 2022 n’échappe pas à la règle dans ce domaine. Quelle que soit leur couleur politique.
Didier TESTOT
Fondateur de LA BOURSE ET LA VIE TV éditeur de www.labourseetlavie.com
média indépendant et plus grande base de données en vidéos avec les dirigeants de sociétés cotés, depuis 2009.