Christophe Mongai Fondateur USM Agent de joueurs : " L'année 2021 ne sera pas facile, il faut être imaginatif, trouver des solutions".
Didier Testot a échangé avec l'agent des joueurs pour parler de l'économie du football pendant la crise sanitaire

10 décembre 2020 15 h 02 min
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Football : Exclu : Didier TESTOT, fondateur de LA BOURSE ET LA VIE TV a eu l’occasion d’échanger sur la situation du Foot français avec Christophe Mongai fondateur de USM Agent de joueurs.

Le marché du football, secoué forcément par le Covid et le manque de recettes. Même si l’Etat a sorti le chéquier. Pour lui cela fait six mois que c’est compliqué niveau sponsoring moins d’argent.

Bien sûr avec les recettes billeterie en moins Son regard : les clubs français ont les reins solides pour tenir, les salaires sont payés ce qui n’est pas toujours le cas dans d’autres pays Grèce, Turquie c’est dramatique et tendu au Portugal et en Belgique où des clubs de Ligue 2 ont fait faillite.

Le gros sujet c’est la visibilité sur les droits TV nécessaires Mediapro en conflit avec FFF, tant que ce sujet n’est pas réglé, les clubs doivent trouver un autre diffuseur. Côté marché des joueurs, il n’y a pas eu beaucoup d’achats, un peu plus de ventes.

Ce qui s’est passé selon Christophe Mongai c’est que les clubs avaient commencé à dépenser l’argent des droits TV (15, 20M environ Il va donc falloir trouver des recettes) Il dit dans cet interview Nous on tient cela fera 22 ans cette année, on tient sur nos réserves avec un CA divisé par 4″.

Et Maradona parti cette année ? : « Maradona quelqu’un qui est resté toute sa vie accessible sans lanque de bois, pas formaté, cela n’existe plus aujourd’hui sponsors obligent ».

L’interview complète de Christophe Mongai USM à découvrir ici :

Christophe Mongai – USM

Interview de décembre 2020

 

 

Christophe Mongai – USM : Bien évidemment, les recettes publiques, c’est important. Ensuite, le sponsoring a baissé aussi parce que les entreprises ont moins d’argent. Aussi bien au niveau des recettes de la billetterie que du sponsoring, on n’a pas eu de bonnes nouvelles, donc ce n’est pas simple. La seule bonne nouvelle qu’on a eue, c’était le contrat qui avait été signé par la Ligue avec Mediapro sur les droits TV. C’était une excellente nouvelle, sauf que ce contrat-là aujourd’hui n’est pas renouvelé et les clubs doivent trouver un autre diffuseur ou renégocier l’accord avec Mediapro et donc cela fait beaucoup de mauvaises nouvelles. Les clubs français ont quand même des reins assez solides et pour l’instant, cela tient. Dans d’autres championnats, c’est plus compliqué.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Pourquoi ? Parce qu’ils avaient des réserves ? On dit toujours qu’on n’a pas forcément une vision très claire de leur situation.

 

Christophe Mongai – USM : Ils ont des réserves, ils vendent des joueurs. Les situations ne sont pas fantastiques, loin de là, mais je dis que ça tient, c’est-à-dire que les salaires sont payés. Il y a évidemment des décalages pour payer des prestataires, etc. Par exemple, ils payent les salaires en premier, puis les autres passent après. Il y a des pays où ils ont déjà trois mois de retard sur les salaires. En France, pour l’instant, je dis que ça tient, mais il est impératif d’avoir de la visibilité au niveau des droits TV.

Web TV www.labourseetlavie.com : Quels pays européens avez-vous en tête ?

 

Christophe Mongai – USM : La Grèce, la Turquie, c’est assez dramatique. Il y a aussi des situations très tendues par exemple en Belgique ou au Portugal, où ça tient, mais ce n’est pas simple au niveau des salaires. Il y a eu des clubs en Belgique qui ont eu du mal à repartir. Il y a eu des petites faillites avec des clubs de Ligue 2…. Cela dépend vraiment des pays. En Grèce ou en Turquie, certains clubs ont déjà trois ou quatre mois de retard au niveau des paiements des joueurs, donc c’est assez compliqué. En France, on n’en est pas du tout là. Les salaires sont payés. Maintenant, il faut trouver rapidement un accord avec un diffuseur TV pour que les clubs connaissent exactement quelle sera leur part de droits TV parce que le budget aujourd’hui en France, c’est bien évidemment en grande partie aux droits TV.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : On pense souvent aux jeunes parce qu’on voit bien, pas que dans le football, mais on se dit qu’il y a une génération qui arrive, pour avoir un emploi, ils vont se trouver face à des gens qui vont attendre.

 

Christophe Mongai – USM : Pour les jeunes en France, il y a un salaire minimum que les clubs sont obligés de payer. Je n’ai pas les chiffres en tête exactement, mais grosso modo pour un premier contrat pro en Ligue 1, c’est aux alentours de 2 500 € ou quelque chose comme ça. Le salaire moyen en Ligue 1, c’est 45 000 € brut par mois, donc ce n’est pas le plus impactant. Ce n’est pas sur ces salaires que les clubs vont être en difficulté, mais plus sur le joueur moyen qu’ils surpayent un petit peu. C’est le joueur moyen qui est remplaçant, un petit peu titulaire, etc., qui a plus de souci à se faire, parce qu’il ne joue pas beaucoup, il ne sert pas beaucoup et il est bien payé.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Sur le Mercato, il y avait l’idée de faire une harmonisation en Europe pour que cela se passe bien. Est-ce qu’il y a eu des choses particulières notables cette année ?

 

Christophe Mongai – USM : Il a fallu un petit peu harmoniser parce que certains pays comme la France a ouvert le mercato en juin et d’autres en juillet, donc pour uniformiser ils ont fait des périodes de trois ou quatre mois de mercato pour tous les pays, comme ça il n’y en a pas un qui a bénéficié de 45 jours en plus. C’était une bonne idée. Les clubs ont continué à investir, un petit peu moins au niveau mondial. En France, les grands clubs n’ont pas été très actifs au niveau des achats. Ils ont fait des ventes. En France, le problème aujourd’hui, c’est que les clubs avaient budgétisé 15 M€ – 20 M€ en fonction de leur classement de budget supplémentaire lié aux droits TV et avaient commencé à dépenser cet argent. Il va falloir trouver des recettes.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Ils ont commencé sans être sûrs.

 

Christophe Mongai – USM : Ils étaient sûrs puisqu’ils avaient un contrat, mais celui-ci n’est pas renouvelé. Donc pour l’instant, la Ligue a fait un prêt qui sert aux clubs français, mais il va falloir des solutions parce qu’on ne peut pas rester comme ça, sans diffuseur. Il faut penser à tous les journalistes qui ont quitté Beien Sport, RMC ou L’Équipe et qui sont allés à Mediapro parce qu’il doit y en avoir un paquet et qui risquent de se retrouver sans travail aussi, parce qu’ils ont énormément recruté. Je ne sais pas comment cette histoire va se finir, mais cela ne sent pas bon.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : On se pose pas mal de questions.

 

Christophe Mongai – USM : Je vous donne l’exemple du mec qui était sur RMC depuis dix ans. On lui a dit « Viens chez nous, tu vas gagner un peu plus », donc il a quitté son poste. Peut-être qu’il va gagner un peu plus, mais dans deux mois il n’aura plus de travail. C’est compliqué.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Effectivement, ça avait l’air beau sur le papier quand ils sont arrivés et qu’ils ont tout remporté quelque part et après vous vous rendez compte que c’est un peu plus compliqué sans diffusion. Cela veut dire que sur le fond, aujourd’hui le système ne fonctionne que si on a ces droits TV qui arrivent.

 

Christophe Mongai – USM : En France, les droits TV sont très importants. Alors, ils le sont moins qu’en Angleterre par exemple où ils sont pharaoniques, mais les clubs français fonctionnent dans leur budget à 50, 60 voire 70 % grâce aux droits TV. Peut-être même plus que ça dans certains clubs. Dans certains pays, les droits TV sont plus faibles, on n’a pas les mêmes ratios, mais en France, c’est capital.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : C’est vrai qu’on pense aussi au football amateur. Est-ce qu’il y a eu beaucoup de dégâts ?

 

Christophe Mongai – USM : Je vais vous dire la vérité, par exemple pour les jeunes qui sortaient de centres de formation à la fin de la saison passée, donc cet été, en général ceux qui ne sont pas gardés par les clubs professionnels vont faire des tests. Cela peut être dans des clubs amateurs, etc. Cette année avec la Covid, il n’y a quasiment aucun test qui a été possible et ces joueurs se sont retrouvés en énormes difficultés. Puis pour les clubs amateurs, les championnats reprennent, s’arrêtent et puis reprennent, il faut continuer les entrainements, mais on n’a pas joué depuis un mois. C’est extrêmement compliqué à gérer.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : C’est complètement désorganisé.

 

Christophe Mongai – USM : C’est compliqué. Honnêtement, je pense que la fédération fait de son mieux, mais ce n’est pas facile à gérer.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Quand on sait le besoin qu’on a de s’entraîner, c’est vraiment compliqué.

 

Christophe Mongai – USM : On a besoin de s’entraîner, on a aussi besoin de jouer. Quand on s’entraine, on n’a pas le rythme du match et quand on rejoue brutalement, on risque de se blesser. Puis il y a la Covid qui arrive où il y a quatre joueurs qui sont Covid, donc les effectifs au niveau amateurs sont beaucoup plus resserrés et ils ont toujours juste le nombre de joueurs et trois ou quatre remplaçants pour se déplacer, donc ce n’est pas facile.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Comment ça se passe ? Vous tenez l’année sur votre activité de vente et d’achat ?

 

Christophe Mongai – USM : Nous, ça fait 22 ans, donc on tient, mais les sociétés qui n’ont pas les reins solides, je pense que beaucoup ont dû arrêter.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Quand vous dites « on tient », c’est plus parce que vous aviez cette structure ?

 

Christophe Mongai – USM : On tient sur nos réserves exactement.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Oui, c’est ça, parce que vous n’avez pas fait grand-chose cette année.

 

Christophe Mongai – USM : Non. Cette année, ça a été dramatique comme toutes les entreprises. On a notre chiffre d’affaires divisé par 4 à peu près. C’est la même chose dans tous les métiers. Comme je vous disais, les clubs payent en premier les joueurs, les gens sont payés après. On a des clubs qui ont du mal à payer, donc on a des retards de six ou sept mois. Cela commence à faire long.

Web TV www.labourseetlavie.com : Comme vous connaissez bien ce secteur, qu’est-ce que vous vous dites ? Peut-être que cela reviendra à la normale en 2021 ou vous dites, non, vu ce qui se passe, l’année 2021 sera un peu chaotique et finalement il faut peut-être une année et demie ? Est-ce qu’il y a une vision finalement de comment ça peut se passer ?

 

Christophe Mongai – USM : Je pense que 2021 ne sera pas facile encore, tant qu’il n’y aura pas de monde dans les stades. Toujours pareil, moins de billetterie, moins de sponsoring, etc., moins de budget pour les clubs, moins de salaires et donc moins de commissions. Ce sont des réactions en chaîne. Je pense que 2021 ne sera pas facile, mais il faut trouver les solutions, il faut se battre. Il faut être créatifs, imaginatifs et volontaires.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Je dirais que tout le monde est concerné. Comme c’est une pandémie, si on sort de l’Europe, on voit qu’il y a d’autres sujets ailleurs. Il n’y a pas un endroit tranquille où on se dit « je vais aller développer mon business là ».

 

Christophe Mongai – USM : Non. C’est pareil partout. À part en Australie, vous avez vu, les stades sont pleins, ils jouent au rugby. Il y a 50 000 ou 60 000 personnes en Australie et en Nouvelle-Zélande, mais étant donné que le football n’est pas très développé là-bas… En Europe, c’est compliqué.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Si on résumait, ce qui pourrait aider, ce serait les droits TV s’il y avait de la visibilité, qu’il n’y ait pas des histoires judiciaires qui trainent jusqu’à on ne sait pas quand, que ça soit réglé d’un côté ou de l’autre, mais qu’il y ait un chèque quelque part. Parce que je crois qu’ils avaient un chèque à faire qu’ils n’ont pas fait.

 

Christophe Mongai – USM : Le premier chèque n’a pas été fait, puis une deuxième traite doit arriver prochainement et je ne sais pas comment ça va se passer.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Parce que ça au moins, cela permettrait d’avoir à nouveau un budget. On n’aurait peut-être pas encore la billetterie, mais au moins il y aurait cette part qui permettrait d’investir.

 

Christophe Mongai – USM : Exactement et c’est une part très importante.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Juste pour terminer, est-ce que vous avez constaté une inflation sur les prix des joueurs ? Avant cette crise, on était sur quelle tendance finalement ? Quand cette crise est arrivée, y avait-il une inflation ou pas ?

 

Christophe Mongai – USM : Il y a eu une inflation sur les très bons joueurs. Mais c’est constant depuis 20 ans. Les très bons joueurs coutent de plus en plus cher, c’est sûr. Le salaire du joueur « normal » reste à peu près le même.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Ceux qui sont repérés où on sait qu’il y a potentiel, cela ne change pas ?

 

Christophe Mongai – USM : Pour les joueurs bons, ils gagnent de plus en plus d’argent, etc. Pour le joueur normal qui fait sa carrière en Ligue 1 ou 2 et c’est fantastique, cela ne change pas grand-chose.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : On peut dire que la hiérarchie en quelque sorte des uns et des autres reste et on aura toujours une espèce de prime pour ceux qui sont vraiment hors normes qu’on voit après sur les stades.

 

Christophe Mongai – USM : Exactement. Mais comme dans tous les métiers, je crois.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Un petit mot pour terminer sur Maradona. Quand on voit ce qui s’est passé au niveau mondial, c’était assez impressionnant. Je l’ai vu sur les réseaux sociaux, c’est vrai que quand on voit ça, on attend toujours des joueurs, alors on a eu Mbappé, mais on voit qu’il est un petit peu en difficulté. Est-ce que vous voyez ou dites qu’en France, on peut retrouver un Platini ? Est-ce que le joueur vraiment exceptionnel, on peut le retrouver ?

 

Christophe Mongai – USM : J’ai fait un post justement sur Maradona, parce que j’ai grandi avec Maradona. Je parle de ma jeunesse en partie avec lui. Maradona, c’est un personnage de Shakespeare. Il est parti de tellement bas et il est allé tellement haut que je pense qu’il n’est pas possible de retrouver ça aujourd’hui. Il était toujours très accessible et sans langue de bois. C’est-à-dire qu’il disait ce qu’il pensait. Alors aujourd’hui, Ronaldo, Messi, leur image est très formatée. Ils font tellement attention à leur sponsoring, à tout ça. Maradona, ce n’était pas ça du tout. Maradona n’avait rien et il est devenu la personne la plus connue au monde devant le Pape. C’était autre chose, c’était une autre époque. Je pense qu’il n’y aura pas un autre Maradona. Aujourd’hui, au niveau des talents français, Mbappé, c’est quand même exceptionnel ce qu’il fait, mais c’est difficile de dire « on a le futur Platini ». Parce que Platini était quand même un des dix, douze plus grands joueurs de l’histoire du football, donc là on va chercher très haut. Mbappé marque des buts, fait des passes, c’est un joueur différent qui fait gagner des matchs, maintenant il faut attendre quelques années pour voir s’il va devenir aussi fort que ce qu’on pense. Pour arriver au niveau de Platini ou de Maradona, c’est compliqué.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Cela nous permettra à nous de dire le fameux « c’était mieux avant ». Oui, nous, on a connu Platini.

 

Christophe Mongai – USM : Platini, c’était impressionnant. À l’époque, le football n’était pas médiatisé comme aujourd’hui. Vous vous rendez compte, Platini aujourd’hui serait une star planétaire alors qu’à l’époque, on l’adorait en France, en Italie, mais après c’était difficile pour que le nom franchisse les continents, Platini il a réussi. Mais aujourd’hui, un mexicain, un uzbek ou un portugais marque un super but et ça fait le tour du monde.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Oui, c’est vrai.

 

Christophe Mongai – USM : Donc, les coups francs de Platini auraient fait plusieurs fois le tour du monde.