Olivier Combastet Président de Pergam Finance.
Gestion d'actifs : De nouveaux types d'investissement

24 juin 2011 1 h 16 min
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Gestion d’actifs : investir hors des sentiers battus. Olivier Combastet Président de Pergam Finance a notamment investi il y a plusieurs années dans les terres agricoles pour les exploiter.

Retour sur ces investissements, ce qu’a changé la crise à la gestion et aux risques, un regard décalé sur l’actualité économique et financière.

Web TV www.labourseetlavie.com : Olivier Combastet, bonjour, vous êtes le président de Pergam Finance. On va parler avec vous de marchés sur lesquels vous investissez, notamment les marchés des terres agricoles qui sont des marchés qu’on connaît encore peu. Alors vous avez investi vous il y a quelques années déjà. Peut-être un petit mot pour commencer l’ambiance sur les marchés, quand vous regardez ce qui se passe aujourd’hui sur les marchés, on a des marchés qui sont quand même inquiets notamment sur les situations des dettes souveraines, vous êtes en dehors de ce monde-là ou quand même un peu dans ce monde ?

 

 

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : On ne peut pas être en dehors de ce monde-là par ce que d’abord ça crée un climat d’attentisme pour les investisseurs. Deuxièmement on sait tous qu’il y a deux manières pour rembourser des dettes. Il y en a une qui est triste et malheureuse qui ont été des guerres, et l’autre c’est l’inflation et donc on pense qu’on aura un environnement forcément inflationniste dans les cinq ou dix prochaines années. Et troisièmement chez Pergam, on a une activité de gestion sous mandat, de gestion privée et donc, bien sûr ça préoccupe et que c’est suivi de près par les personnes chargées de cette activité.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Qu’est-ce qui a le plus changé justement avec la crise du côté de vos investisseurs, des gens qui vous confient leur argent effectivement ? Est-ce que c’est plus de sécurité ? Plus de compréhension ? Peut-être des produits, des investissements ? Qu’est-ce qui a le plus changé de votre point de vue ?

 

 

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : Ecoutez, rien n’a changé parce que rien ne bouge. Donc en fait en gros on est dans un attentisme important. Il y a trois équations que les gens n’arrivent pas à résoudre, c’est la monnaie de référence, quelle est la meilleure entre les deux grands malades que peuvent être l’euro et le dollar, donc ça ils n’ont pas réglé le sujet. Le deuxième sujet qu’ils n’ont pas réglé c’est : que va-t-il advenir des dettes des états souverains et de leur notation, éventuellement du prix de cette dette ? Et le troisième sujet qu’ils n’ont pas réglé, c’est comment on sort du problème grec parce qu’on sait tous que de toutes les façons la Grèce ne remboursera jamais les dettes qu’elle a. Donc non, ce n’est pas réglé.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Ce qui veut dire qu’ils hésitent et que entre les investissements, on va dire, classiques qu’on connaît traditionnels, action, obligation, immobilier, on sait que l’argent au jour le jour ne rapporte rien ou très peu.

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : Alors, l’argent au jour le jour ne rapporte rien mais le cash est roi parce que vous avez beaucoup de gens qui préfèrent rester liquides d’abord parce qu’ils ne savent pas où investir et deuxièmement parce qu’ils se disent que demain ils auront de meilleures opportunités d’investissement. Nous, on a toujours une faiblesse particulière pour les actifs réels, notamment ceux qu’on a évoqués en début d’entretien dans l’agriculture et à l’occasion de la levée de fonds, l’augmentation de capital qu’on fait pour notre entreprise en Amérique du Sud, on a constaté un appétit non négligeable de la part d’investisseurs français mais aussi européens et également institutionnels sur le continent européen pour ce type d’actifs pour trois ou quatre raisons assez simples qu’on pourra développer si vous le souhaitez.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Oui, justement, alors on a vu, on va dire que les terres agricoles ça a été, ont été des actifs qui ont été peut-être ignorés pendant longtemps …

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : Absolument.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Qui soudainement ont suscité de l’intérêt.

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : C’est un actif qui a connu quarante ans de ringardise à peu près, qui est le temps de la déflation des produits agricoles qui a commencé dans les années soixante. Aujourd’hui, en termes nominaux, les prix agricoles, malgré la violente hausse récente, ne sont toujours pas revenus, alors je le dis en termes nominaux au niveau où ils étaient il y a quarante ans, le pétrole il est trois ou quatre fois au-dessus de là où il était il y a quarante ans, les prix agricoles ne sont pas revenus, ça veut pas dire que les prix agricoles vont continuer à monter de manière désordonnée et erratique, il ne le faut pas parce que je pense que c’est pas souhaitable.

 

Par contre aujourd’hui on se rend compte que il y a trois choses importantes qui sautent aux yeux : premièrement c’est que ce qu’on a besoin de plus de production agricole pour nourrir la planète à la fois à cause de la démographie et de la destruction de terres agricoles sur certaines parties de la planète ; deuxièmement on a besoin également d’une meilleure logistique agricole pour être plus efficient ; troisièmement la productivité des terres qui sont travaillées dans des conditions extrêmement intensives, notamment dans l’hémisphère Nord parce que l’hémisphère Sud travaille de manière beaucoup moins intensive et beaucoup plus faible. Donc aujourd’hui comme cette productivité commence à plafonner, on est obligé de trouver des nouvelles sources de production et nous, on est fier et heureux de contribuer à produire une dizaine de produits diversifiés, de matières premières diversifiées, pour pouvoir les vendre soit directement à des industriels, soit sur des marchés.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : C’est-à-dire qu’il y a un vrai bouleversement du modèle au-delà de l’intérêt sur l’actif même, terres agricoles, d’aller effectivement sécuriser ces approvisionnements, on est dans des marchés de plus en plus volatiles.

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : Je crois qu’il y a quatre types d’intérêts. Il y a un premier intérêt qui est un intérêt d’investissement pour des gens qui ont une vision de protection contre l’inflation, une vision très patrimoniale à long terme, ça c’est indiscutable. Il y a un deuxième intérêt qui est une vision de dire que pour améliorer les rendements agricoles, plus on est gros, plus on peut opérer de manière efficiente et efficace, je pense que ça marche jusqu’à une certaine limite de taille. Il y a un troisième vecteur qui est important, c’est l’entrée de capitaux institutionnels, fonds de pension, fonds d’université, pays souverains, opération par exemple que vient de faire la Chine en Argentine dont personne ne parle en Europe, une opération qui porte sur près d’un million d’hectares loués à une province argentine dans des conditions complètement officielles, de gouvernement à gouvernement, avec 1,2 Mds de dollars d’investissement à la clé sur une période de vingt ans.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Donc, là, c’est un enjeu crucial.

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : C’est un enjeu crucial, stratégique, vous avez 60 millions de tonnes de soja qui sortent de l’Argentine pour aller vers la Chine et vous commencez à avoir des accords bilatéraux. Nous, ce qui nous intéresse là-dedans, c’est de constituer un portefeuille de propriétés d’actifs très diversifié parce que on ne croit pas au modèle sud-américain complètement qui est trop monoculture et qui est trop, à notre avis, risqué et correspond pas à ce qu’on envie de faire.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Pour éviter les effets de surproduction qu’on peut avoir parfois.

 

 

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : Oui, les effets de surproduction, la conception qu’on a de l’agriculture qui doit être diversifiée et qui doit respecter un petit peu la biodiversité, une réduction aussi du risque, et puis aussi les possibilités que peuvent nous offrir des territoires pour travailler, par exemple pour travailler du riz, pour faire de l’élevage laitier, pour faire de l’élevage tout court, et puis pour produire des céréales ou des oléagineux.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Alors, vous aviez investi justement en terres agricoles en 2005, je crois…

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : On a commencé à investir indirectement en fait avant. En 2003 on avait pris une position importante dans une société argentine cotée à New York qui s’appelle Cresud qui est un opérateur agricole.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : 2003, donc on a huit ans après

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : On s’est rendu compte qu’il fallait être près de la ferme, donc on a cédé notre titre dans de bonnes conditions et en 2005 on s’est dit : « Trouvons des associés locaux, essayons de voir comment on peut permettre à des investisseurs qui comprennent l’équation agricole qui est en train de changer, comment on peut les associer un développement sur un modèle sur lequel c’est pas acheter et rien faire, c’est acheter, développer, produire avec des règles importantes qui est d’avoir un management local, de faire des investissements socialement responsables, de créer des jobs, pas pour créer des jobs, mais parce que on a un plan qui fait qu’on a une stratégie de diversification, d’améliorer ce qu’on achète », souvent on achetait des choses à des Brésiliens, à des européens qui s’étaient jamais occupés de leurs actifs, et puis créer une vraie entreprise tournée sur le développement agricole et c’est ce qu’on a fait.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Là donc 2011, levée de fonds, c’est encore pour d’autres investissements ?

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : C’est pour d’autres investissements complémentaires au nord de l’Argentine, donc il y a un peu la nouvelle frontière agricole et puis également en Uruguay et puis en location de terres dans la partie sud de la province de Buenos Aires qui s’appelle la Pampa Omidao où sont parmi les ou les meilleures terres du monde ou en tout cas l’agriculture la plus productive au monde.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Alors, dans d’autres investissements, vous aviez aussi investi sur l’immobilier américain décoté à un moment donné, aujourd’hui si on se place en 2011, donc on a parlé des terres agricoles, cet immobilier décoté on a l’impression que ça ne va pas encore bien….

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : Alors, passer de l’agriculture à l’immobilier américain, c’est un exercice qui n’est pas toujours cohérent, mais en fait il est cohérent, je vais vous expliquer pourquoi. L’immobilier, nous, on aime les actifs réels sur lesquels on sent qu’il y a des points d’inflexion dans le cycle, l’immobilier américain pour vous faire l’histoire très courte, vous avez deux immobiliers américains, vous avez celui qui fait la une des journaux, qui est 20 % du secteur immobilier aux États-Unis, c’est un immobilier qui est la maison individuelle, la maison résidentielle avec tout le cortège de souffrances et de problèmes que peuvent avoir les gens qui n’arrivent pas à rester dans leur maison, nous c’est un secteur dans lequel on n’est pas présent ou vraiment présent qu’à la marge parce que on ne veut pas rentrer dans ce genre de choses, on ne souhaite pas investir de cette manière-là. On est présent de manière très active sur trois segments, immeubles de bureaux à New York, on a commencé à investir fin 2008-début 2009, centres commerciaux en Californie où on a commencé à investir fin 2008, tout au long de 2009 et 2010, et puis le multi-family qui est plutôt le logement résidentiel locatif sur lequel on a commencé à investir, et, à la marge, quelques terrains à lotir qui peuvent être rachetés. Je pense que le timing d’entrée qu’on a eu, en tout cas avec les opérateurs auxquels on est associé, est bon parce que ces trois classes d’actifs ont repris beaucoup d’altitude alors que la partie maison individuelle qui est 20 % du secteur aux États-Unis reste encore scotchée. J’invite les gens qui s’intéressent à ça à regarder sur Internet les différents secteurs et ils verront que cette partie-là s’est bien reprise. Voilà, donc on est content des investissements qui ont été faits et qui continuent à être faits.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : En conclusion, donc plutôt des investissements effectivement à part, différents, la principale leçon que vous gardez, vous, de cette crise, de cette période qui est quand même un peu compliquée quand on est investisseur aujourd’hui, qu’on soit fortuné ou pas, alors fortuné on peut aussi faire des erreurs, il y en a qui ont fait des erreurs en croyant au miracle à New York, effectivement il y en a qui ont pensé que sur certains secteurs, il n’y avait pas de risque, le risque, l’évaluation du risque reste prédominante, d’abord ça, risque-rendement, on revient à la base d’investissements ?

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : La principale leçon aujourd’hui c’est quoi ? En fait, je pense qu’il y a peu de leçons à tirer pour l’instant parce qu’on est vraiment dans une équation où il y a trop d’inconnues. D’habitude c’est assez binaire, là aujourd’hui il y a quand même trois ou quatre inconnues qui sont importantes.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Donc, on est obligé de diversifier les deux premières règles peut-être ?

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : La première règle, je pense, c’est qu’on est obligé de diversifier. Je pense que si on veut bâtir quelque chose, c’est de se dire qu’on va avoir de l’inflation, c’est clair, c’est de se dire qu’en Europe la croissance, je pense qu’on a tous compris qu’on n’en aurait pas beaucoup, donc c’est soit être sur des métiers de rente, soit d’être sur des métiers de rente et faire de la croissance externe. La troisième leçon c’est de se dire que les pays émergents c’est très bien, mais pour être bien placé, pour être proche d’un pays comme le Brésil où je peux vous dire que quand vous prenez – moi j’aime bien les indicateurs de base vous voyez. J’étais à San Paolo il n’y a pas longtemps, j’ai pris le taxi pour aller de l’hôtel à l’aéroport, ça m’a coûté à peu près, pas loin de quatre-vingts euros, et puis j’ai invité des gens à déjeuner dans un restaurant d’un hôtel de la ville, une chaîne américaine que je ne citerai pas mais que tout le monde connaît qui se termine en On, ça a coûté soixante-quinze euros par personne, ce qui sont des prix quand même très élevés. Quand vous voyez ça dans un pays par ailleurs avec sa population, avec le taux d’endettement que peuvent avoir certaines classes sociales de cette population, les intérêts qu’ils payent, les gens qui payent des crédits à la consommation, ils payent des 18, 22, 24, 26 % et une devise qui n’a jamais été aussi chère qu’aujourd’hui, aujourd’hui le réal est à un prix stratosphérique, il ne faut pas regarder que du côté de la Chine, il faut se dire qu’il y a probablement des respirations, il va y avoir des respirations dans d’autres économies, voilà.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Eh bien merci d’avoir fait le point avec nous sur ces actifs et votre point de vue également sur le marché, Oliver Combastet, on rappelle que vous êtes donc le Président de Pergam Finance.

 

 

 

Olivier Combastet, Président de Pergam Finance : Voilà. Eh bien merci.

© www.labourseetlavie.com 23 juin 2011. Tous droits réservés.