Résultats annuels 2012 : Interview de Dominique Ceolin Pdg ABC Arbitrage.
Spécialiste des marchés financiers, la société a subi un environnement "trop calme" en 2012
Spécialiste des marchés financiers, la société a subi un environnement « trop calme » en 2012.
Pas de volatilité, afflux de liquidités par les banques centrales, les métiers d’arbitragistes n’ont pas été facile à réaliser en 2012.
Nous parlons de la stratégie de la société, de son évolution, mais aussi de l’environnement règlementaire ou fiscal qui conduit à des interrogations sur l’avenir de la place financière à Paris.
Notre invité est Dominique Ceolin Pdg ABC Arbitrage.
Web TV www.labourseetlavie.com : Dominique Ceolin, bonjour. Vous êtes le PDG de ABC arbitrage, on va revenir avec vous sur l’exercice 2012 et puis sur ce qui se passe dans votre secteur de la finance, vous avez réagi à la dernière actualité concernant à la fois des taxes sur les transactions financières et puis toute cette réglementation qui s’est mise en place pendant la crise. Revenons sur l’année, elle a été difficile pour vous, vous faites des arbitrages, on le rappelle, vous allez nous donner des détails mais compte tenu de ce qui se passe sur les marchés ?
Dominique Ceolin, Pdg de ABC arbitrage : Oui, le métier de l’arbitrage est sensible à certains paramètres de type volatilité qui mesurent l’agitation des marchés, de type volume, et aussi on a besoin de nouvelles opérations qui créent notre matière première de travail, et ces trois paramètres-là ont été particulièrement faibles, j’allais dire historiquement faibles en 2012, donc cela nous a été défavorable.
Web TV www.labourseetlavie.com : Effectivement, si on regarde la volatilité, certains disent « de toute façon, avec ce volume de liquidités amenées par les banques centrales, il n’y a pas de raison que cela change pour l’instant en tout cas ».
Dominique Ceolin, Pdg de ABC arbitrage : Oui, c’est vrai que c’est…, ce que l’on constate en 2012 en tout cas depuis que la banque centrale, qui a commencé cela autour de novembre 2011, depuis que la banque centrale a émis un flux de liquidités très important, nous constatons que, malgré les mauvaises nouvelles ou les bonnes d’ailleurs, les marchés sont finalement relativement calmes ou trop calmes ou étrangement calmes par rapport à ce qui se passe. Donc c’est vrai que c’est vraiment un constat clair de 2012, la volatilité a été éteinte par cette décision politique finalement de calmer les marchés. Pour autant, on peut penser qu’avec un retour des investissements en actions qui finira par arriver, c’est cyclique tout cela, on peut penser qu’il y aura de la volatilité qui peut revenir, à la hausse comme à la baisse, ABC arbitrage n’est pas spécialement un oiseau de mauvais augure et on peut être tout à fait agréablement surpris par des volatilités à la hausse.
Web TV www.labourseetlavie.com : On le dit aussi, quand on a vu par exemple ce retour sur les marchés actions, quand on regarde concrètement ce qui s’est passé, on voit qu’il y a peu de volume toujours, donc il y a toujours des grands investisseurs, les fameux investisseurs institutionnels qui, pour l’instant en tout cas, n’ont pas…, ne sont pas vraiment revenus sur ces marchés actions.
Dominique Ceolin, Pdg de ABC arbitrage : Oui, je pense que c’est le défaut en fait de la liquidité apportée par la BCE entre autres, c’est qu’en fait on est sur une espèce de ventre mou des marchés, on n’a pas suffisamment corrigé par rapport aux mauvaises nouvelles économiques pour que les investisseurs aient envie de revenir massivement sur les marchés actions et on n’a pas non plus une euphorie suffisante, économiquement parlant, pour que finalement même au niveau actuel on ait envie de réinvestir de manière importante. Néanmoins, on sent une modification des marchés, les gérants collectent à nouveau, ce qui est assez récent. Il y a les marchés obligataires qui sont maintenant à des niveaux assez élevés et donc qui poussent un petit peu les investisseurs à retourner vers les marchés actions, et on peut penser, en tout cas il y a des petits signaux qui peuvent laisser penser que on aurait un retour de volume et de nouvelles opérations dans les mois qui viennent.
Web TV www.labourseetlavie.com : On parlait de vos arbitrages justement, ce que l’on a constaté en 2012 on l’a constaté pour toutes les classes d’actifs ou presque, c’est… ?
Dominique Ceolin, Pdg de ABC arbitrage : Alors, toutes les classes d’actifs pour ABC arbitrage oui, c’est-à-dire que nous travaillons sur le Forex et là nous avons atteint aussi des points bas de volatilité, on tombe en dessous de 5 % de volatilité tout début 2013, ce sont vraiment des marchés morts, cliniquement morts. On constate aussi des baisses de volume très important sur les futures, ce qui est totalement atypique, c’était un produit qui était totalement épargné sur cette faiblesse de volume, et pourtant 2012 on voit une chute importante de volume sur certains mois, donc oui, toutes les classes d’actifs ont été touchées pour ABC arbitrage.
Web TV www.labourseetlavie.com : Qu’est-ce que vous pouvez faire, vous, en tant que société dans ce contexte-là ? Qu’est-ce que vous faites en interne quand « il ne se passe rien sur les marchés » ?
Dominique Ceolin, Pdg de ABC arbitrage : De manière générale, on peut pleurer un bon coup, mais de manière générale, il ne faut pas se laisser, je dirais, abattre par de telles situations. On travaille quand même sur de nombreuses classes d’actifs mais il faut apprendre à travailler dans des marchés moins volatiles ou moins fournisseurs de volume ou moins fournisseur de nouvelles opérations, et donc nous avons mis en place un certain nombre de stratégies de recherche qui doivent nous permettre de nous décorréler partiellement de cette situation, décorréler partiellement cela ne veut pas dire pour autant que cela va nous faciliter la vie, et comme je l’ai expliqué, c’est vrai que par rapport à nos ambitions initiales, je l’avais dit déjà il y a trois ans, si les marchés restent atones, on aura beaucoup de mal à réaliser ces ambitions initiales.
Web TV www.labourseetlavie.com : Cela veut dire envisager d’autres classes d’actifs, envisager d’autres produits, qu’est-ce que cela peut vouloir dire pour vous ?
Dominique Ceolin, Pdg de ABC arbitrage : Oui, alors c’est vrai que sur les produits, on aimerait pouvoir développer de nouveaux produits, cela demande un petit peu de travail et un petit peu de coûts de recherche, l’exemple des obligations Corporate est un bon exemple. De notre point de vue actuellement, nous ne savons pas faire des choses type arbitrage en tout cas sur ce type de produits, or c’était un produit très travaillé par les investisseurs directionnels, j’allais dire, dans les années 2011 et 2012. Donc il va falloir apprendre néanmoins à aller vers des produits qui sont différents, qui vont nous permettre en fait de travailler dans des marchés à volatilité basse.
Web TV www.labourseetlavie.com : Est-ce qu’il y a des marchés sur lesquels vous n’êtes pas où sur lesquels vous allez peut-être réfléchir à y être ?
Dominique Ceolin, Pdg de ABC arbitrage : Alors, la chose qui est sûre, c’est que nous savons faire de l’arbitrage. Il faudrait définir ce que c’est exactement l’arbitrage, cela est peut-être un peu long, mais nous savons faire de l’arbitrage, nous restons dans ce métier de l’arbitrage qui est un métier qui a montré une véritable efficacité en termes de résultats, je rappelle que nous avons fait que des résultats positifs, c’est notre 18ème exercice positif, donc cela montre quand même des qualités certaines avec un résultat financier qui reste solide, plus 32 % de performances de gestion brute avant charges et impôts, cela reste quand même très significatif, mais c’est vrai que pour afficher de nouvelles ambitions, il faut imaginer aller chercher peut-être soit des créneaux horaires que nous ne travaillons pas aujourd’hui sur des pays asiatiques, soit des nouveaux produits sur lesquels nous avons aujourd’hui du mal à aller, je dois le reconnaître.
Web TV www.labourseetlavie.com : On a vu effectivement, compte tenu de ce qui s’est passé pour vous, un décrochage du titre en bourse par rapport à d’autres indices, on sent qu’il y a des nuages noirs qui s’amoncellent sur votre secteur, pas simplement sur ABC arbitrage, mais sur la finance en général avec bien sûr un certain nombre de taxes, des questions sur les rémunérations des traders, vous avez vous mis un certain nombre de…, je dirais, vous avez expliqué un certain nombre de mesures qui arrivent, on a l’impression que là, l’avenir est sombre.
Dominique Ceolin, Pdg de ABC arbitrage : Alors, encore une fois, soit on pleure, soit on travaille et on trouve des solutions. Je pense que ABC arbitrage a toujours opté pour la seconde option, travailler et trouver des solutions, mais je dois reconnaître qu’il y a un certain nombre de mesures qui sont prises, qui sont politiquement compréhensibles, la finance a eu un grand nombre de cas à scandale, et plus je me bats pour expliquer que la finance est une industrie positive, plus il y a des cas qui sortent, donc je reconnais que ce n’est pas facile d’être audible dans ce genre de situation-là. Mais il faut garder quand même en tête que la finance est une industrie, et cela je pense que c’est très important pour les régulations qui sont à mettre en œuvre ou les taxes qui sont à mettre en œuvre, c’est une industrie qui génère des impôts, des emplois et des choses positives. Il faut en condamner les excès mais je dois reconnaître que les dernières mesures qui ont été prises sont des mesures qui sont quand même très difficiles à digérer pour l’industrie financière. Alors quelles sont-elles ? Alors, en particulier la taxe sur les transactions financières françaises est un bon exemple à mon avis d’une mauvaise taxe, c’est une taxe qui est pré-bénéfice, avant même que l’on commence à travailler, et l’exemple de ABC arbitrage est tout à fait illustratif en la matière. ABC arbitrage a un manque à gagner d’à peu près d’un million d’euros en 2012 sur ce sujet, cela veut dire que ce million d’euros de manque à gagner, il n’a payé ni taxe sur les transactions financières, ni impôt sur les sociétés puisque on n’a pas gagné d’argent sur ce fameux million d’euros en question. Donc c’est une taxe qui finalement n’a pas collecté quelque chose de positif, ni à travers la fameuse taxe ni à travers l’impôt sur les sociétés, donc je pense que c’est une taxe qui est comprise du grand public parce que politiquement il y a une espèce de sanction, de punition, et les gens avaient envie de cela et je le comprends très bien, mais économiquement, elle n’est pas bonne.
Web TV www.labourseetlavie.com : Alors, on voit aussi des sujets sur…, entre la place de Paris, place de Londres, on voit aussi qu’il y a une bataille qui se joue. Il y a des questions aussi là-dessus c’est-à-dire que des questions de délocalisation de la finance parisienne dans d’autres endroits ?
Dominique Ceolin, Pdg de ABC arbitrage : Alors, je pense que la finance parisienne a perdu une grosse partie du combat, y compris pour des décisions que l’on peut comprendre politiquement, je pense que la taxe sur les dividendes, 3 % des dividendes distribués cela donne une espèce d’impôt sur les sociétés implicite de plus 3 %, c’est énorme. Je pense que le système de rémunération, qui a eu des excès, que nous avons nous-mêmes combattus chez ABC arbitrage depuis déjà de nombreuses années, et donc qu’il fallait réformer et qui est en passe d’être réformé et je trouve cela très bien, a une fiscalité en France qui ne devient pas du tout compétitive par rapport à la place de Londres, et c’est vrai que l’on sent autour de nous les rumeurs ou le brouhaha d’un mouvement de délocalisation progressif vers des places plus financières je dirais ou en tout cas plus en acceptation de la finance que la place de Paris.
Web TV www.labourseetlavie.com : Donc il va falloir aussi que la finance se réforme parce que quand vous listiez un petit peu les sujets, quand on voyait par exemple les niveaux du scandale du Libor, on voit des milliers de milliards, cela fait beaucoup quand même.
Dominique Ceolin, Pdg de ABC arbitrage : Oui, oui, encore une fois, je reconnais les excès de la finance et je reconnais que l’industrie financière a émis un certain nombre de pollutions, comme d’autres industries peuvent le faire, l’industrie chimique, l’industrie automobile, l’industrie des médicaments, on a vu encore dernièrement des scandales en la matière, donc je pense que l’on n’est pas exempte de corrections. L’industrie financière n’a pas su s’auto-réformer, donc il est normal que les politiques prennent à leur charge un certain nombre de réformes, et je trouve cela très bien, en particulier les lois de séparation bancaire, j’y suis tout à fait favorable, depuis une dizaine d’années je milite pour cela, mais je dois reconnaître que par ailleurs avec cette colère qui existe et qui est un petit peu naturelle ou justifiée, il ne faut pas pour autant détruire une industrie qui est source d’emplois et finalement de choix démocratique.
Web TV www.labourseetlavie.com : Le mot de la fin peut-être sur 2013 pour les actionnaires qui ont vu ce cours de ABC arbitrage baisser, qu’est-ce que vous leur dites sur 2013 ?
Dominique Ceolin, Pdg de ABC arbitrage : 2013 ne commence pas dans des conditions plus favorables que 2012, pour autant cela fait, encore une fois, 18 ans que ABC arbitrage a su démontrer des résultats positifs, a une distribution de dividendes et un rendement tout à fait significatifs et nous allons nous battre au quotidien, et les signes sont plutôt bons, pour continuer à distribuer de tels rendements, donc je dirais confiance même si je peux comprendre que la baisse du titre soit cohérente avec nos résultats qui ont été aussi en baisse.
Web TV www.labourseetlavie.com : Merci Dominique Ceolin d’avoir été avec nous, donc PDG de ABC arbitrage.
© www.labourseetlavie.com. Tous droits réservés, le 29 mars 2013.
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